Les premiers instants du film de Xavier Giannoli - on disait de son récent À l'origine qu'il s'agissait d'une « fable morale dans l'univers culturel contemporain », ce qui s'applique aussi étrangement bien à ce film-ci - sont véritablement fascinants. La mise en contexte de ce récit particulièrement prometteur, qui se propose d'examiner la notion de célébrité à une ère où ce « concept » ne veut plus rien dire, est à la fois stimulante et inédite, avec juste assez « d'inexpliqué ». On est happé par cette histoire; pas tellement parce qu'on a l'impression que ça pourrait arriver à chacun d'entre nous d'un moment à l'autre, mais justement parce que cela arrive trop souvent qu'un inconnu devienne célèbre sans même qu'on sache pourquoi.
Or, Superstar ne souhaite pas « expliquer » - en fait, peut-être le souhaite-t-il, mais il ne le peut pas, personne ne le peut - ce qui rend la question « Pourquoi? » caduque. C'est plutôt le « comment » qui l'intéresse, en ce que la célébrité a d'impact sur la vie quotidienne des gens. Parfois ironiquement, parfois mélodramatiquement, Superstar tente donc de transformer Kad Merad (une célébrité s'il en est une en France) en quidam célèbre. Honnêtement, cette transformation fonctionne, du moins dans la première partie du film.
C'est lorsque le film abandonne bêtement cette piste pour se consacrer à une étrange histoire d'amour, impliquant des personnages secondaires dont les intrigues semblent préfabriquées (elles le sont, on comprend bien, mais elles paraissent ici particulièrement plaquées) qu'on perd un peu le sens de la quête. Idem lorsqu'on fait une excursion dans le milieu criminel interlope - une perte de temps. Le récit s'allonge inutilement et perd en intensité. En contrepartie, le propos sur les médias, même s'il tire parfois sur la leçon, est fascinant, et particulièrement bien adapté au médium cinématographique. La réalisation nerveuse de Giannoli est capable de créer et de cerner la tension et son travail est compétent.
Kad Merad, dans le contre-emploi, démontre un grand talent, une grande capacité d'adaptation, mais son personnage, si peu responsable de son malheur et si peu impliqué dans sa résolution, n'est jamais véritablement à l'avant-plan. Ce sont les autres personnages qui contribuent à le définir, par leurs maladresses et par leurs questionnements, moralement et philosophiquement intéressants la plupart du temps. Ce qui nous amène au personnage de Cécile de France, bien trop mal défini pour être le véritable moteur du récit, et trop ambigu pour que le film entier ait la cohérence qu'il exigeait puisqu'il aborde autant de sujets d'actualité.
Les choses ne s'arrangent pas lors de la finale, qui semble abandonner cette intéressante réflexion amorcée près de deux heures plus tôt pour proposer une conclusion consensuelle, facile, simple. Dommage, on tenait avec Superstar quelque chose de pertinent et de fascinant à la fois. Vers la fin du film, le personnage principal s'interroge tout haut : « Tout ça aura servi à quoi? ». On doit avouer qu'on se le demande aussi.