Mieux vaut tard que jamais. Après un septième épisode qui faisait dans la nostalgie et un Rogue One avec peu de personnalité, on a enfin droit à un véritable Star Wars avec The Last Jedi qui est une suite directe à The Force Awakens. C'est un beau cadeau pour cette franchise qui célèbre cette année son 40e anniversaire.
Quel plaisir d'arpenter une galaxie lointaine qui ne sent pas trop la redite! Derrière un schéma éprouvé dont le cadre narratif est celui du magistral The Empire Strikes Back, le scénario arrive à s'en distancer suffisamment pour offrir autre chose. Tout est dans la découverte de mondes incroyables où l'imagination est au pouvoir. L'aventure qui suit quelques destins parallèles (Finn et ses amis qui tentent de sauver les restes de la Résistance, Rey qui aimerait recevoir l'enseignement de Luke Skywalker) ne manque pas de scènes d'action trépidantes, dont quelques morceaux d'anthologie osent s'affranchir de la musique légendaire de John Williams.
S'il y aura toujours plein de drames shakespeariens et plusieurs trahisons de taille, l'humour y est presque omniprésent, faisant de cet épisode le plus rigolo du lot. Notons un BB-8 équipé pour veiller tard, Chewbacca qui fait des concours de cris attendrissants avec les trop mignons Porgs, des répliques souvent truculentes et des détails qui feront instantanément sourire.
Quelques nouveaux personnages apparaissent à l'horizon, dont une vice-amirale énigmatique (Laura Dern), un mercenaire tout aussi louche (Benicio del Toro), une rebelle courageuse (Kelly Marie Tran), un BB-9E menaçant et des tonnes d'irrésistibles bestioles. On retrouve une psychologie plus fouillée au niveau de la majorité des têtes connues. Peut-être pas chez le bidimensionnel Finn (John Boyega) ou le simpliste Poe (Oscar Isaac), mais du côté de Luke et Leia, dont leurs interprètes Mark Hamill et surtout la regrettée Carrie Fisher semblent plus préoccupés que jamais. Rey (Daisy Ridley) obtient cependant la palme de l'être le plus fascinant du lot, un sabre laser devant le emo Kylo Ren (Adam Driver) qui fait autre chose que pleurnicher.
Évidemment, ce qui handicapait la série est toujours là. C'est politiquement trop correct, moralisateur à ses heures et ultimement peu original. À force de voir débarquer un tome chaque année (Solo: A Star Wars Story arrive sur les écrans dans à peine cinq mois...), le sentiment de nouveauté n'y est plus, empêchant du coup le charme de fonctionner comme il se doit. Surtout que cet épisode, le plus long de la série, s'avère souvent redondant.
On ne se fait toutefois pas prier pour y embarquer. Le réalisateur et scénariste Rian Johnson (Looper, Brick) connaît son sujet et il possède le talent nécessairement pour satisfaire toutes les générations de fans. S'il vise le divertissement efficace à tout prix, ce n'est pas pour y sacrifier une certaine profondeur, qui apparaît dans les thèmes (notamment les vendeurs d'armes) et la noirceur de quelques idées ou individus. Il y a surtout suffisamment de surprises et de révélations au menu pour développer un nombre incalculable de théories en attendant l'épisode 9 en 2019.