Pour la troisième fois en seulement 15 ans, Hollywood a décidé de repartir à zéro sa lucrative série sur Spider-Man. Il y a eu les trois tomes « réalistes » de Sam Raimi (dont le second demeure encore le volet le plus magistral de toutes les aventures de l'homme-araignée), les deux mal-aimés mais terriblement divertissants de Marc Webb qui revenaient aux origines plus bédéistes et maintenant Homecoming qui s'inscrit dans l'univers des Avengers. Certains personnages figuraient d'ailleurs dans Captain America: Civil War.
Que valent ces péripéties en solo qui donneront des tonnes de suites en cas de succès? Du bon et du moins bon. Dans la première catégorie se dresse Tom Holland, idéal dans la peau du jeune héros. On a droit cette fois à un Spider-Man adolescent et l'interprète qui brillait déjà dans The Impossible et The Lost City of Z s'amuse comme un petit fou. Il semble vraiment posséder cet âge ingrat, alliant nonchalance et désinvolture. Découvrir ses pouvoirs - un autre terme pour puberté - se fait dans la joie et l'enthousiasme, surtout lorsqu'ils sont plus nombreux qu'on le croyait auparavant.
C'est en exploitant à fond cette période unique de l'existence d'une personne que Homecoming sort du lot. L'amitié prime, tout comme les béguins amoureux, et il faut obtenir de bonnes notes à l'école afin de pouvoir être accepté à l'université de son choix. Évidemment, à la fin il y a le traditionnel bal et la pression est énorme de venir accompagné. Lorsque le film de superhéros est devenu la norme, le faire retomber dans le genre est possible et c'est ce que parvient à faire cette production en lorgnant vers les classiques de John Hughes comme Pretty in Pink! C'est rafraîchissant et souvent rigolo.
La magie s'estompe malheureusement lorsque le long métrage retourne à son essence première et qu'il ressemble aux précédentes créations de Marvel. L'histoire concoctée à douze mains (!) devient alors prévisible et relativement ennuyante, avec cette introduction fastidieuse et ces retournements de situations téléguidés. Les intéressantes pistes sociales sont rapidement sabotées (ce sont les ouvriers qui s'attaquent aux riches de ce monde) et c'est l'action qui prime sur le reste. Sauf que ces scènes d'explosions et de confrontations sont souvent illisibles. Le cinéaste Jon Watts (à qui l'on doit le prometteur mais inabouti Cop Car) n'a pas nécessairement l'expérience requise dans ce type de superproduction et cela paraît à l'écran, offrant quelques-uns des morceaux musclés les plus banaux des récentes adaptations de bandes dessinées au cinéma.
Contrairement aux antagonistes des précédentes moutures de Spider-Man, le méchant de Homecoming n'est pas très élaboré. La psychologie primaire de Vulture empêche même le grand Michael Keaton de sauver les apparences. S'il semble renouer avec l'être iconique qu'il incarnait dans le grandiose Birdman, les comparaisons s'arrêtent là. Un seul moment l'éloigne momentanément de tous les clichés en place : la confrontation pleine de suspense qu'il a avec Holland dans l'automobile tout juste avant son bal des finissants. Il s'agit certainement de la séquence la plus mémorable de l'ensemble. Plus que les apparitions douteuses de Marisa Tomei en tante de Peter Parker et de Robert Downey Jr. qui offre un Iron Man plus caricatural que jamais.
Il y a deux films fort différents qui se combattent sans cesse au sein de Spider-Man: Homecoming. Celui qu'on veut voir et qui explore le genre autrement. Puis celui beaucoup plus conventionnel qui ressemble à tout ce qui a été fait avant. Ce n'est pas toujours l'idéal pour repartir une licence sur de nouvelles bases et ce, même si Tom Holland est parfait pour le rôle-titre. Qui sait, peut-être que les suites seront en mesure de conserver uniquement le bon côté de ce Mini-Wheats que l'on ne finit plus d'étirer et de resservir à des sauces soi-disant nouvelles.