C'est à n'y rien comprendre. L'enfant d'hier a passé sa jeunesse à jouer aux Transformers et autres Teenage Mutant Ninja Turtles... sans jamais retrouver la même magie avec les différentes adaptations cinématographiques. L'histoire s'est répétée avec les G.I. Joe. Après l'exécrable navet The Rise of Cobra et l'à peine moins mauvais Retaliation, à quoi fallait-il s'attendre de Snake Eyes (non, il ne s'agit pas d'un remake de l'étonnant film de Brian De Palma mettant en vedette Nicolas Cage)?
Étrangement le résultat est presque bon. Snake Eyes a toujours été un des personnages les plus énigmatiques de la série et ce retour aux origines permet d'en savoir davantage sur ses blessures profondes. Évidemment le scénario concocté à six mains est des plus génériques et les dialogues éculés matraquent les oreilles de morales attendues (loyauté envers le clan, régler ses comptes avec le passé, la vengeance c'est mal). Mais qui se tourne réellement vers ce type de production pour explorer la profondeur du genre humain?
C'est l'action qui prime et elle est souvent spectaculaire à défaut d'être toujours originale. Il ne faut pas nécessairement se fier au combat tout juste après la traditionnelle introduction qui paraît brouillon et mal chorégraphié. Ou à cette confrontation assez quelconque de yakuzas qui ferait hurler de rire Takeshi Kitano tant elle laisse à désirer.
Le long métrage de deux heures prend son temps et il commence à en mettre plein la vue en arrivant au Japon, multipliant les affrontements au sommet et les poursuites décoiffantes. Encore une fois, il ne faut pas s'attendre à du Kurosawa, à du King Hu ou même à The Villainess qui a récemment révolutionné le film d'action. Mais à un travail compétent de la part du réalisateur Robert Schwentke (la série The Divergent, le premier R.E.D.), qui sait utiliser favorablement la richesse des décors et des néons qui sont à sa disposition afin de faire oublier son montage trop frénétique et sa trame sonore inégale.
La plus belle carte dans son jeu est certainement Henry Golding, parfait dans le rôle-titre. L'acteur brille dans le non-dit (pour s'en convaincre, il faut absolument découvrir le magnifique Monsoon) et il laisse à nouveau parler son corps. Dommage qu'il n'y a pratiquement personne pour lui rendre la pareille. Les personnages limités n'ont souvent qu'une seule fonction (l'ami, l'amoureuse potentielle, l'aveugle), alors que les plus compétents - incarnés notamment par Iko Uwais du brillant diptyque The Raid - demeurent sous-exploités.
C'est ironiquement lorsqu'il revient aux fondements de la série que le récit s'enlise. Pourquoi est-ce qu'il y a ce bijou qui donne une force phénoménale? Et pour quelles raisons les icônes sont aussi caricaturales? Ursula Corbero n'a absolument rien à jouer tant sa Baroness est médiocre, alors que Samara Weaving de Ready or Not peine à rendre crédible sa Scarlett qui n'est qu'un simple ersatz de Black Widow.
Faisant suite à deux tomes catastrophiques, Snake Eyes rappelle qu'il y a encore de l'espoir dans les aventures des G.I. Joe au cinéma. Même si elle est encore trop sérieuse et formatée, l'intrigue évite de verser dans la stupidité rocambolesque, se concentrant autour de séquences musclées et efficaces qui n'ont rien à envier au dernier volet de Fast & Furious. Pour une fois, ça sent bon pour la suite...