Vu au Festival du Film de Toronto.
Le nom de Denis Villeneuve est aujourd'hui associé à l'excellence. Le réalisateur québécois en est venu à cette notoriété, même aux États-Unis et en Europe (rappelons que Sicario faisait partie de la sélection officielle du Festival du Film de Cannes, le plus prestigieux du monde). Donc, avant même qu'on ait vu une seule image de Sicario, on savait déjà que le film qu'on s'apprêtait à nous présenter était un chef d'oeuvre (à quelques nuances près peut-être)... Ce qui explique d'ailleurs les centaines de journalistes et membres de l'industrie qui étaient cordés en rang d'oignons devant le cinéma Banque Scotia à Toronto pour avoir la chance de voir cettedite merveille avant tout le monde.
Évidemment, le temps n'était pas à la déception. Denis Villeneuve nous prouve à nouveau avec ce film bouillonnant et tempétueux l'étendue de son talent. La réalisation, incisive et intuitive, nous permet d'entrer dans cette atmosphère, à la fois de vengeance, de survie et de tyrannie, qui règne au sein du cartel mexicain. Une superbe direction photo assurée par nul autre que Roger Deakins (The Shawshank Redemption, No Country for Old Men, Skyfall) est appuyée par une ambiance sonore saisissante, paralysante même par moment. Le bruit des respirations humaines est probablement l'un des sons les plus hypnotisant du film. Bien que la musique prend une place significative dans Sicrario, un silence obnubilant vient pondérer la trame sonore.
Bien que Sicario est un film lourd, violent et intense, quelques bribes d'humour - noir - ont été apposées ici et là pour contrebalancer avec l'ambiance étouffante créée autour de l'intrigue principale. Emily Blunt livre une performance magnifique dans le rôle de cet agent du FBI entraîné dans une affaire nébuleuse impliquant un affrontement entre des cartels de drogues mexicains. C'est aussi de la détresse de cette agente dont parle Sicario. Le film nous amène à nous identifier à cette femme qui s'évertue de prendre les bonnes décisions, mais qui est souvent contrainte à choisir le camp adverse. Blunt déploie une telle intensité dans son jeu qu'on ne peut qu'être bousculé par ce à quoi elle est confrontée. Il faut dire que Benicio Del Toro et Josh Brolin sont aussi incroyables. Le premier incarne un homme mystérieux qui ne veut révéler pour qui il travaille ou quel est son rôle au sein de la mission et le second interprète un agent à la fois désinvolte et impétueux qui demande qu'on obéisse à ses ordres sans condition. Ces personnages aux antipodes proposent une brochette délectable qui garde le public en haleine jusqu'à la fin.
Il n'y a pas de temps morts dans Sicario. Le film s'amorce sur une séquence suffocante (et magnifique) alors que les corps de police américains font une descente dans une résidence de l'Arizona. Sans vous révéler trop de détails, disons que les coeurs fragiles auront du mal à ne pas détourner le regard (au TIFF, nous avons vu Sicario sur un écran IMAX; j'ai donc personnellement détourné le regard...).
Sicario est un thriller sensationnel qui nous garde sur le bout de notre siège deux heures durant. Le film, bercé par un scénario intelligent et mené par des acteurs particulirement talentueux, mérite toute l'attention qu'on lui a récemment accordée, et plus encore.