Même dans le cas d'un film d'action, d'un pur produit de divertissement, même en été, à 40° à l'ombre, en sandales, Salt est un film profondément imbécile qui enchaîne les coups de chance et les mauvaises décisions. C'est la pire chose pour un cinéphile de bonne foi, qui ne se laissera pas berner par les raccourcis stupides qu'ont choisi d'emprunter les artisans de ce film débilisant. Mettant probablement en vedette les agents secrets les plus stupides de l'histoire de l'humanité (la scène finale en hélicoptère atteint des sommets de bêtise), Salt semble être un cas typique : quelqu'un, quelque part, a eu une idée, personne n'a eu le courage de lui dire qu'elle n'avait aucun sens et on s'est rendu à la fin en bouchant les trous le mieux possible, en fermant les yeux et en disant : « il ne se rendront compte de rien! ». Quand c'est un plombier, un mécanicien ou un maçon qui agit de la sorte, on ne lui pardonne pas, pourquoi faudrait-il faire autrement avec un réalisateur?
Evelyn Salt est une agente de la CIA. Prise en otage en Corée du Nord, elle est libérée et peut rentrer au pays, où elle épouse un spécialiste des araignées duquel elle est très amoureuse. Un jour pourtant, un espion russe venu se livrer à la CIA l'accuse d'être une espionne au solde des intérêts russes et d'avoir la mission d'assassiner le Président russe lors de funérailles à New York. Devenus méfiants à son égard, ses supérieurs essaient de l'interroger, mais elle s'enfuit afin de rejoindre son mari. Là s'amorce une chasse à la femme entre Washington et New York.
Cela réduit grandement la qualité des scènes d'action lorsque le héros se sort de tous les faux-pas parce qu'il est chanceux, plutôt qu'avec son talent ou ses habilités spécifiques. Quand une cascade est une simple question de timing (tiens, un bouchon de circulation!), elle devient bien moins prenante, d'autant que dans un film comme celui-ci l'intérêt n'est pas tellement de savoir si le héros (dans ce cas-ci l'héroïne) va s'en sortir, mais bien comment. Quand il ou elle dépend du passage (ou pas) d'une semi-remorque aléatoire pour la poursuite de son plan, le facteur « émerveillement » est réduit à néant. Salt passe tellement de fois de justesse dans une porte presque fermée qu'on se demande : elle aurait fait quoi, une seconde plus tard? On aurait bien souhaité que son cas soit réglé dès le départ, ça nous aurait sauvé 1h40.
On s'ennuie d'autant plus qu'il n'y a rien d'autre que ces scènes d'action pour nous divertir. Les acteurs peuvent bien se débattre avec l'imbécilité de la trame narrative du film et la mollesse des dialogues, rien n'y fait : Salt est mal conçu et insuffisant, à la limite de l'insulte pure et simple. Avec ses flashbacks inspirés des Feux de l'amour, son intrigue de Guerre Froide et ses nombreuses invraisemblances, on a vraiment affaire à un film de lâches, de fainéants (Kurt Wimmer, le scénariste, est aussi responsable d'Ultraviolet et Philip Noyce a déjà mieux paru).
Mais encore une fois, tout n'est pas perdu, et un film comme Salt peut nous permettre d'apprendre une ou deux choses sur la vie, advenant le cas où une histoire semblable se produirait de notre vie. La chose la plus importante : mettre le doute dans l'esprit des services secrets américains en s'enfuyant alors qu'ils veulent vous interroger, c'est vraiment, vraiment débile. Envoyez quelqu'un d'autre protéger votre mari, répondez aux questions et réglez le cas une fois pour toutes. Bon, on ne fera peut-être pas de film sur votre histoire, mais croyez-moi, c'est mieux comme ça.