Elton John est un personnage fascinant, une légende de la musique qui méritait un film biographique à la hauteur de son talent et de son extravagance. Malgré les efforts colossaux déployés par Dexter Fletcher, Rocketman n'est probablement pas cette oeuvre grandiloquente qu'on espérait pour lui.
Le choix de faire une comédie musicale pour dépeindre la vie tourmentée d'Elton John venait de soi. Le chanteur aux tenues flamboyantes et à l'attitude théâtrale cadre parfaitement dans ce genre de production ludique. Malheureusement, l'effet n'est pas entièrement réussi. Des séquences chantées et dansées s'entremêlent avec des scènes de drame. Les personnages s'approprient les paroles des chansons, rendant certaines pièces un peu trop littérales. Cette interprétation de « I Want Love » par son père, sa mère, sa grand-mère et lui-même alors qu'il n'était qu'un gamin nous laisse perplexes, même si on saisit l'intention derrière la proposition.
Malgré tout, le réalisateur Dexter Fletcher a osé proposer quelque chose de différent, de casse-cou et de débridé; on ne peut certainement pas lui reprocher son manque d'audace...
L'histoire nous est racontée par Elton John, alors qu'il se retrouve en cure de désintoxication avec d'autres alcooliques et toxicomanes. Le personnage relate les passages marquants de sa vie afin de guérir de ses dépendances et de se libérer de ses démons. Un long métrage linéaire, sans aucune forme de narration, aurait peut-être été profitable dans ce cas-ci puisque ces retours réguliers dans la salle des AA compromettent le rythme de l'ensemble. Puis, même s'ils sont le point de départ de sa déchéance, les parents d'Elton auraient pu prendre moins de place dans le film. À un moment, ça devient un peu freudien comme facture.
Impossible de ne pas applaudir, par contre, le travail exceptionnel de Taron Egerton qui incarne avec beaucoup de nuances le stupéfiant protagoniste. À travers son jeu multicolore, il nous fait passer par toute une gamme d'émotions. On gagne un immense respect pour le personnage en visionnant ce long métrage et c'est en grande partie grâce à l'acteur principal qui transcende l'écran. Il faut dire que Jamie Bell offre aussi une brillante performance sous les traits de l'auteur Bernie Taupin, fidèle collaborateur de John depuis ses débuts. Leur complicité est touchante et belle.
Les musiques accrocheuses et les tenues complètement déjantées du héros nous propulsent dans un univers chatoyant dont les paillettes traversent l'écran pour se coller à notre peau. L'optimisme du film, sa fougue et sa beauté nous transportent encore plusieurs heures après le visionnement, même si on n'arrive tout de même pas à oublier ses défauts.