On ne compte plus les histoires d'amitié entre des enfants et de gentilles créatures monstrueuses. A Monster Calls a cependant la particularité d'être plus sombre que tous les BFG et Pete's Dragon qui l'ont précédé.
Il s'agit en fait d'un mélo pleinement assumé où tout semble arriver à notre jeune héros. Maman est gravement malade, papa a refait sa vie à l'autre bout du monde, des enfants de son école le tabassent et de mauvais rêves viennent régulièrement le hanter. Son seul exutoire est l'énorme arbre à côté de chez lui qui, quelques minutes après minuit, se réveille pour lui raconter des histoires.
Cette transposition du best-seller de Patrick Ness (qui assure ici l'adaptation) ne brille pas nécessairement par son originalité. Ce conte où la colère et l'anxiété du protagoniste prennent la forme d'une entité merveilleuse et vieille comme la littérature et elle a déjà été mieux exploitée ailleurs (sur Where the Wild Things Are, notamment). Surtout que la construction dramatique séparée en histoires saccade ponctuellement le rythme, ensevelissant le récit initiatique sous des morales élémentaires, rendant le tout encore plus lourd. C'est avant qu'une couche de larmes fasse son apparition.
Les excellents interprètes ne s'en laissent heureusement pas imposer et c'est tout en leur honneur. Le jeune Lewis MacDougall que l'on a pu voir dans Pan arrive à faire passer sa souffrance avec son seul visage et Liam Neeson lui rend bien de sa grosse voix d'arbre branchu. Un peu moins subtile, mais tout aussi appliquée est la performance de Felicity Jones en mère malade et de Sigourney Weaver en grand-mère sévère. Un quatuor qui s'avère le vecteur idéal pour véhiculer les émotions, sans doute manipulatrices, quoique assez efficaces.
L'esthétisme soigné du long métrage est toutefois sa principale qualité. Sa beauté plastique teintée de gothisme risque de faire rougir Tim Burton alors qu'un soin encore plus considérable a été apporté aux intermèdes imagés qui prennent la forme de dessins animés ou d'encre poétique. Le tout étant alimenté d'ingénieux effets spéciaux. Le choix d'avoir confié la mise en scène à J.A. Bayona était donc le bon. Le cinéaste espagnol s'était déjà approprié cet univers mélancolique sur son solide L'orphelinat tout en ayant exploré les thèmes de l'enfance et de la résilience via son vigoureux The Impossible. Surtout qu'il se plaît à multiplier les hommages à son pays d'origine, que ce soit en affublant son arbre de mimiques de Frankenstein (ce qui fait écho au classique L'esprit de la ruche) et en donnant un rôle secondaire à Geraldine Chaplin, extraordinaire dans le grandiose Cria Cuervos qui se déroulait également sous fond de parents absents, de rêves et de souvenirs.
Moins mémorable que Le labyrinthe de Pan qui s'adressait peut-être à un auditoire plus âgé, A Monster Calls traite avec sensibilité de sujets graves, cherchant espoir auprès de la noirceur fantastique et réconfort dans l'imagination salvatrice. Un cocktail qui a fait ses preuves et qui opère à nouveau malgré quelques bémols narratifs.