Il n'y a pas seulement qu'au cinéma québécois qu'un humoriste perd son éclat comique lorsqu'il joue dans un film. La tendance se répercute également chez nos voisins du sud.
Elle est loin l'époque de Steve Martin et de Bill Murray. Réussir à faire rire lors de Saturday Night Live est une chose, rien ne dit que cette touche magique se répercutera par l'entremise du septième art. Bien qu'il se soit assuré des succès tôt dans sa carrière, la filmographie de Will Ferrell est en chute libre ces dernières années. De son côté, Kevin Hart cherche à faire sa place dans ce milieu extrêmement compétitif. Deux grands comiques lorsqu'ils se retrouvent sur scène, mais qui sont incapables d'amener un long métrage à bon port.
Ils essayent pourtant, ils font l'impossible. Ensemble, c'est le délire. Les séances d'improvisation font amplement sourire et elles permettent de lâcher leur fou. Sauf qu'après quelques minutes d'égarement, les conventions du récit les obligent à revenir à l'histoire. Et lorsqu'elle n'est guère intéressante, comme c'est le cas de celle de Get Hard, c'est la débandade.
Cette prémisse d'un riche et naïf homme blanc qui demande à un pauvre type noir de le conseiller afin d'éviter le pire en prison ne peut que rappeler le beaucoup plus réussi Trading Places qui mettait en vedette Dan Aykroyd et Eddie Murphy. Mais au lieu d'offrir une réflexion pertinente sur les classes sociales, il n'y a que des calembours excessivement répétitifs sur les malfrats de couleurs qui ont un casier judiciaire, les gais qui courtisent tout ce qui bouge et les risques élevés de se faire violer en prison. Il s'agit évidemment d'une satire et il ne faut pas tout prendre au pied de la lettre, ce qui n'empêche pas l'humour d'être teinté d'homophobie et de racisme.
En se moquant des stéréotypes en place à coup de... stéréotypes, l'effort est incapable d'offrir autre chose que des gags superficiels, grossiers et inégaux où les coups sous la ceinture sont légion. Il faut une intelligence pour faire passer un message, ce que n'essaye même pas ce scénario qui tente en vain le politiquement incorrect et qui demeure tout simplement inoffensif.
Au moins, Etan Cohen s'en sort honnêtement pour sa première réalisation (on lui doit entre autres les écrits de Men in Black 3 et Tropic Thunder), bien qu'il n'offre rien de très transcendant. D'une durée d'à peine 100 minutes, Get Hard a tôt fait de tourner en rond à cause de son rythme déficient. Adam McKay qui agit ici en tant que producteur aurait certainement offert un meilleur résultat. Il est capable de soutirer le meilleur de Will Ferrell et son amour pour la parodie a transformé des productions routinières comme Anchorman et The Other Guys en classiques cultes.
Levant aussi haut que le jeu de mots que sous-entend son titre, Get Hard est une autre preuve que le talent d'humoristes s'exporte mal au cinéma. Will Ferrell et Kevin Hart sont capables de faire rire une roche et même en petite forme, ils s'avèrent les meilleurs éléments de ce film qui manque toutes les occasions d'être autre chose qu'une farce vide et primaire.