Ce que l'on peut dire d'emblée sur le film Polisse, sans trop s'engager dans la critique et le jugement, c'est qu'il s'agit d'une oeuvre dure, vraie (parfois tellement que ça en devient difficile à regarder) et puissante. On joue sur plusieurs niveaux d'émotions; l'attendrissement, l'indignation, la colère. On semble toujours mettre le spectateur à l'épreuve, l'amener à réfléchir sur l'incongruité des situations reconstituées à partir d'évènements réels; qu'est-ce qui est acceptable dans notre société? Pourquoi certains ont le droit à un toit, à la pitance, au respect, alors que d'autres crèvent dans les rues? Pourquoi, selon la loi (française), une jeune fille qui enfante d'un violeur devrait nommer le foetus? Polisse est un long métrage qui se veut provocateur, qui aspire à réveiller la fougue la plus belliqueuse chez l'être humain en lui présentant des images d'enfants détruits par des adultes inconscients. C'est une oeuvre qui ose - tant techniquement que narrativement - et qui transperce le coeur de quiconque a déjà serré un enfant dans ses bras.
Il est évident que le sujet - la Brigade de protection des mineurs de Paris, qui enquête sur différents cas d'abus - impose d'emblée une atmosphère licencieuse, dépravée, mais pour engendrer la sympathie du public et pour susciter son animosité, le style visuel, le montage, la musique et tout ce qui a trait à l'aspect technique doit aussi soulever l'émoi. Maïwenn utilise différents éléments pour nourrir cette facture cinématographique grinçante; un générique d'ouverture candide à outrance, un collage d'images nerveux, plusieurs plans longs et lourds et un scénario habilement découpé; le résultat en est stupéfiant, ou plutôt pétrifiant. Certaines répliques suscitent également la chair de poule chez le cinéphile. Qu'on doive expliquer à une mère que de battre son enfant pour qu'il arrête de pleurer n'est pas une solution intelligente ou à une adolescente que se prostituer n'est pas une nouvelle mode du XXIe siècle mais bien une déviance est absolument déconcertant.
Polisse dépeint également la vie personnelle de ces policiers qui, chaque jour, sont confrontés à des histoires semblables - de viol, de prostitution, de violence de toutes sortes - et qui s'efforcent de ne pas flancher sous la pression. Ce qui est intéressant dans le portrait de ces agents, c'est leur hétéroclisme. Chacun d'eux a une manière très singulière d'approcher son travail et cela impacte les victimes qui se réfèrent à eux et leur famille. Le récit global de l'oeuvre est, en fait, généralement assez bien développé; les différents dossiers que traitent les policiers s'harmonisent efficacement avec leur destin respectif; il n'y a que les quelques dernières scènes qui clochent. On semble avoir voulu terminer le film sur une note bouleversante (probablement pour conclure la montée dramatique de l'oeuvre) aux dépens d'une structure narrative cohérente. Même si une finale-choc est souvent efficace, elle ne doit pas se faire à n'importe quel prix.
Le long métrage, qui a remporté le prix du jury au dernier Festival de Cannes, parvient - là où beaucoup échouent - à provoquer le spectateur et à l'amener à se questionner sur certaines choses qu'il croyait, naïvement, impensables. D'entendre les os d'un bébé se fracasser après d'une mère intoxiquée l'ait échappé sur le sol est un bruit qu'on ne peut effacer de notre mémoire tout comme celui des cris d'un enfant qu'on sépare de sa mère gueuse.
Polisse est un long métrage qui se veut provocateur, qui aspire à réveiller la fougue la plus belliqueuse chez l'être humain en lui présentant des images d'enfants détruits par des adultes inconscients. C'est une oeuvre qui ose - tant techniquement que narrativement - et qui transperce le coeur de quiconque a déjà serré un enfant dans ses bras.
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