Sorti il y a à peine six mois, X racontait les tribulations d'une équipe de cinéma et de leur rencontre mortelle avec un couple de personnes âgées. C'est là qu'on faisait la connaissance de Pearl, une vieille dame surprenante à bien des égards.
Se déroulant 60 ans plus tôt, Pearl plonge dans la jeunesse de cette femme (Mia Goth) qui rêve de devenir danseuse afin de quitter la ferme familiale, et surtout sa mère acariâtre (Tandi Wright).
Après s'être fortement inspiré du cinéma horrifique des années 1970 et en particulier le climat de terreur de The Texas Chainsaw Massacre, le cinéaste Ti West change son fusil d'épaule en multipliant les hommages aux films muets, aux comédies dansantes, aux suspenses à la Hitchcock jusqu'aux mélos façon Douglas Sirk, revisitant les années 1910 à 1950 avec beaucoup d'entrain. Ici, il détourne The Wizard of Oz en donnant froid dans le dos. Là, il utilise de vieux procédés artistiques et sature l'écran de musique pour rappeler que le septième art est d'abord composé d'images et de son.
À tel point que presque rien n'existe au-delà de cet exercice de style brillant, mais un peu vain. Le pastiche prend toute la place, faisant sourire tout en demeurant beaucoup trop évident. Surtout que le récit, prévisible, répétitif et un brin longuet, peine à explorer les parts d'ombre de son héroïne. Évidemment que son rêve sera broyé et qu'on exploitera sa naïveté. Son salut ne passera pas par le chemin rêvé, mais sans doute par des vidéos coquines, bouclant la boucle de la trame narrative de X où le personnage joué par Maxime (également interprétée par Mia Goth) finissait par se laisser séduire par le cinéma pornographique.
Fidèle à ses habitudes, le créateur des très efficaces The Inkeepers et The House of the Devil palie ses faiblesses scénaristiques en soignant sa mise en scène. Sa direction artistique, fabuleuse, rivalise avec sa photographie, luxueuse, et sa riche reconstitution d'époque. Il sait surtout fabriquer de réelles scènes meurtrières qui sont à la fois drôles et sanglantes. Sans doute que son utilisation du crocodile peut lasser, mais quand il utilise le plan séquence lors d'une poursuite, l'effet impressionne.
Pearl appartient toutefois complètement à Mia Goth. L'actrice qui est à son meilleur en participant à des projets tordus - High Life, Nymphomaniac, A Cure for Wellness et le remake de Suspiria - porte le film sur ses épaules, livrant une prestation impressionnante aux émotions contradictoires. Elle est toute enjouée et fantaisiste, avant de se transformer subitement en bête sauvage et dérangée assoiffée de gore.
On ira d'ailleurs voir le long métrage pour elle. Pour sa présence magnétique, son dérangeant discours tardif et ce dernier plan à glacer le sang, qui ne s'oubliera pas de sitôt. À tel point qu'elle fait presque de l'ombre au résultat final, plus chargé et prisonnier de ses références, qui demeure malgré tout transgressif à ses heures et bien amusant.