Ce film-là, on l'a vu des centaines de fois, voire des milliers. C'est l'histoire d'un gars ordinaire qui rêve d'un monde meilleur, il fait confiance à la mauvaise personne, il s'ensise dans des projets douteux, met en danger ses amis et sa nouvelle copine super sexy (qui a été séduite par lui parce qu'elle croyait qu'il n'était « pas comme les autres »), et finit par faire le bon choix, le choix juste, afin de corriger ses fautes et améliorer la face du monde. Comme ce film-là nous l'avons vu des milliers de fois, nous connaissons déjà la fin après les quinze premières minutes. On devine même quelles seront les morales qui en ressortiront. Ici : « Toujours se rappeler qui on est vraiment », un classique.
Si l'histoire de Paranoia était solide, originale, bien construite, peut-être nous serait-il possible de faire abstraction de son classicisme, mais comme le long métrage de Robert Luketic (comme presque tous les films de Robert Luketic, oserais-je dire) comporte de nombreuses failles et plusieurs incongruités, il est plutôt difficile de s'en désintéresser. Attention par contre, Paranoia n'est pas un « mauvais » film, mais c'est un film qui suit tellement à la lettre un plan qu'on lui a assuré être infaillible qu'il en devient lassant.
Le film fait des erreurs tellement faciles à éviter qu'on se demande pourquoi personne ne s'est penché sur la question à l'écriture du scénario, ou à la relecture. Des détails; un homme qui marche au lieu de courir alors qu'il est dans une course contre la montre ou des amis et une famille très peu atteints par le fait que le héros passe du jour au lendemain de technicien sans le sou à cadre, chargé de projets, dans une grande entreprise de technologies de pointe, des détails qui dérangent et nous amène à décrocher.
La réalisation de Luketic n'est pas particulièrement inspirée, ni le jeu des comédiens - Liam Hemsworth, Gary Oldman, Harrison Ford - qui s'acquittent de leur rôle, sans plus. Bien sûr, Paranoia n'est pas le genre de production dans laquelle on s'attend à voir de grandes performances d'acteurs, mais un peu d'enthousiasme supplémentaire n'aurait pas nui, ni aux comédiens, ni au réalisateur, qui semblent tous être sur le pilote automatique, semblant jouer dans ce film parce qu'il leur permet de remplir un quota qu'ils ont signé avec le studio (probablement la vérité pour quelques-uns d'entre eux).
Paranoia est un exemple parmi tant d'autres d'un canevas bien huilé et surexploité par Hollywood. Il a su prouvé son efficacité, mais le septième art a aussi pu démontrer qu'il était capable de produire tellement plus que de simples numéros qu'on se demande pourquoi on s'entête à minimiser la nouveauté ainsi et à multiplier les tout-inclus.
Comme pour sa forme, ses thématiques manquent d'originalité. Disparition de la vie privée, pillage de technologies, bouleversement de la société par les réseaux sociaux et les téléphones cellulaires intelligents sont des débats auxquels ont fait référence à tous les jours dans les journaux et qui, évidemment, sont le centre névralgique de bien des productions cinématographiques modernes. Paranoia aurait pu être un film brillant, s'il était sorti - un pas bien placé aurait suffi - des sentiers battus peut-être qu'il aurait pu éviter d'être qualifié de duplicata.