Il y a un phénomène assez particulier avec le film Origami. Il ne faut pas parler de la « vraie histoire » derrière la production. Le fait que vous sachiez qu'il s'agit d'un drame explorant le phénomène du voyage dans le temps est suffisant. En connaissant la suite, les détails de la trame narrative, on prive le public d'un étonnement qui pourrait entacher considérablement son appréciation de l'oeuvre.
Ce n'est pas faux de dire que cette surprise provoquée par la divulgation du « drame » qui amène le protagoniste à vouloir se déplacer sur sa propre ligne du temps est suffisamment intéressante pour vouloir la protéger. Reste que le long métrage est construit de façon si chaotique que l'intérêt du spectateur se dissout rapidement, et ce malgré la présence de cette surprise.
Rendre un film déconstruit cohérent est un défi de taille que Patrick Demers n'est malheureusement pas parvenu à accomplir. On aurait tellement voulu qu'Origami soit notre Memento québécois, mais il ne s'avère être qu'un petit film de genre audacieux qui tombe vite à plat. On apprécie le fait que le réalisateur joue avec son public, entre folie et science-fiction, mais il aurait quand même fallu être plus explicite pour ne pas perdre trop de cinéphiles en cours de route. Le cinéaste aurait pu s'amuser encore davantage avec notre esprit, sans pour autant confondre le spectateur.
À la fin du film, le cinéphile n'est pas certain d'avoir compris ce que le réalisateur a voulu transmettre comme message. Et cette confusion, plutôt que de nourrir une saine curiosité, le contrarie. La lenteur de l'oeuvre fera aussi décrocher certains adeptes d'oeuvres de science-fiction plus vigoureuses. Le drame Origami s'avère plus contemplatif qu'énergique. Certaines scènes auraient pu aisément être complètement supprimées tellement elles nous apparaissent inutiles. En fait, Origami aurait fait un excellent court métrage, dans un format si long, il perd de l'intérêt à chaque minute qui passe.
Il faut quand même mentionner que François Arnaud fait un travail exceptionnel dans le rôle de ce restaurateur d'oeuvres d'art tourmenté. Il est souvent seul devant la caméra et passe par une large gamme d'émotions. Cette scène dans l'avion lors de laquelle il réalise l'erreur qu'il vient de commettre est d'une puissance sans nom. Impossible de ne pas avoir la chair de poule!
Origami est né d'une bonne idée. Malheureusement, le rendement n'est pas à la hauteur de l'initiative. Sur papier, le projet était probablement excitant, mais, dans les faits, la feuille a été pliée tellement de fois qu'on ne sait plus trop à quoi ça devait ressembler au départ...