Ah les histoires d'amour! C'est le sujet préféré des films hollywoodiens. Normal, ça touche tout le monde à presque tous les âges. On ne comprend pas ce que c'est que l'amour qu'on sait déjà ce que ça doit être, grâce au cinéma. Les films d'amour contribuent à définir l'identité sexuelle des enfants et à cerner les attentes liées au sexe dans la vie de tous les jours. Ils aident à rêver. Leur impact est pernicieux et immense sur notre quotidien et influence même notre langage - on dit bien « trouver le Prince charmant », non? Voilà ce que n'est pas Nuit #1.
Personne ne rêve d'une histoire d'amour (ou de cul?) comme celle de Nuit #1.
Nuit #1 c'est un peu l'anti-Katherine Heigl; c'est le contraire de ces films où tout est beau - 27 Dresses, The Ugly Truth, ces choses-là - dans lesquels les filles veuillent se marier et les gars sont des ados attardés. Le premier long métrage de la réalisatrice Anne Émond est une illustration, une division - dans le sens de contraire « d'union » - entre les individus qui forment l'amour, le couple, dans ce cas-ci un gars et une fille. Les attentes liées au sexe sont habilement déjouées par le film (c'est l'homme qui reproche à la femme d'avoir voulu se sauver en douce après la baise, alors qu'en théorie, ça devrait être le contraire; Nikolaï prétend que les femmes modernes agissent comme les hommes) et les attentes spectatorielles le sont du même coup pour un plaisir décuplé.
Même Clara est influencée par ce que nous nommons depuis le début « les films d'amour », sans distinction ni subtilité. Elle aurait souhaité que Nikolaï lui demande de rester, voyez-vous, c'est une romantique. La complexité des personnages et leur connaissance d'eux-mêmes est fascinante, et même si Nuit #1 ne recèle aucune surprise « narrative », il demeure imprévisible et déstabilisant. Mais attention. Nuit #1 n'est pas plus « réaliste » (quoique...) que ces « films d'amour ». Théâtral, appuyé, pas exactement « surjoué », mais... surréaliste.
Il y a l'élégance des dialogues qui y est pour beaucoup, et bien sûr le talent des deux comédiens, Catherine de Léan et Dimitri Storoge, pour les rendre, mais aussi cette mangifique danse/combat et l'utilisation, modérée, mais signifiante, de la musique et de la poésie. Il y a un appel au grandiose dans ce plus petit dénominateur commun (est-ce qu'on apprend encore ça en troisième année?), car dans la complexité des personnages se trouve une petite partie de tout le monde qui a à peu près cet âge-là et qui a déjà vu un film d'amour.
L'amour, ce n'est pas nécessairement beau, ensoleillé et lumineux - tout comme les corps, les abdominaux, les seins refaits... et un mariage, ça coûte cher - et c'est probablement tant mieux. On s'ennuierait si tout était parfaitement parfait, tel qu'espéré, comme on s'ennuie le plus souvent dans 27 Dresses, The Ugly Truth, ces choses-là. Mais on ne s'ennuie pas, dans Nuit #1. C'est une coïncidence vous croyez?