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Dame-Nation.
Revenir si tôt sur un drame qui a bouleversé le monde par sa valeur symbolique était peut-être risqué de la part de Jean-Jacques Annaud. Lui qui sort d’une traversée du désert de près de dix ans, parsemée de bides commerciaux et/ou artistiques dont le summum fut cette anomalie cinématographique qu’était « Sa majesté Minor ». Mais il faut rappeler que l’incendie qui a ravagé l’un des monuments les plus visités au monde, Notre-Dame de Paris, n’a fait aucune victime. Rien à voir donc, par exemple, avec les attentats du 11 septembre 2001 (le « World Trade Center » d’Oliver Stone ou le « Vol 93 » de Paul Greengrass avaient fait grincer des dents et choquer certaines familles de victimes à l’époque car trop frais dans les mémoires) ou avec ceux de Paris du 13 novembre, dont le souvenir trop vif a fait reporter ou annuler certains projets jugés trop opportunistes et sujets à discorde. Ici, c’est de la pierre et « Notre-Dame brûle » peut se voir autant comme une reconstitution de cet impressionnant spectacle de désolation dont tout le monde se souvient que comme un hommage appuyé au travail des pompiers. Dans les deux cas, c’est un pari gagné dans les grandes lignes.
Dans les grandes lignes seulement car « Notre-Dame brûle » souffre de quelques maladresses flirtant parfois avec le ridicule ou le malvenu et de certaines lourdeurs inhérentes à ce type de projet que l’on pourrait qualifier de commémoratif. Dans la première catégorie on note certaines séquences comme celles concernant la vieille dame et son chat ou la réaction de Trump sur Twitter, toutes deux totalement hors propos. Quant à la seconde, on pense à cette séquence niaise au possible avec la petite fille et sa bougie mais aussi un excès de symbolisme parfois gênant (la Vierge qui pleure en est le parfait exemple). On ne savait pas Annaud si candide. Pour le reste, l’émotion vient plutôt de ces parisiens chantant en cœur des chants chrétiens ou de ce prêtre remerciant Dieu d’avoir sauvé la Couronne d’épines. Plus réaliste, plus concret, plus vrai et touchant. De plus, le film est très instructif aussi bien sur la manière dont s’est déroulé le drame mais aussi sur le fonctionnement d’un tel monument. On est presque dans le documentaire.
Et c’est ce choix du cinéaste de se positionner entre la fiction et le documentaire qui permet au long-métrage de cocher toutes les cases de la réussite. Si, dans ce contexte de film presque catastrophe, il s’était plongé dans une pure fiction avec éventuellement une histoire d’amour à la clé à la « Titanic », il y avait de fortes probabilités de sombrer dans un pathos de mauvais aloi. Quant à un pur documentaire, on aurait eu une impression de déjà-vu (la télévision s’en est chargée) et un manque d’émotion. Cet entre-deux s’avère donc l’angle privilégié à raison. Le fait de prendre des acteurs non-professionnels ou méconnus renforce le sentiment d’identification et c’est bien vu. En mêlant également reconstitution très réussie grâce à d’excellents effets spéciaux et des images d’archives ou réelles, Annaud trouve le bon équilibre et rend son film spectaculaire et immersif. On n’a pas le temps de souffler et de voir comment toute cette suite d’infimes événements a pu aboutir à un tel désastre est passionnant. Annaud a réussi un retour fracassant, certes non dénué de défauts, mais qui vaut clairement le coup d’œil.
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