Ce sont les yeux bouffis, le nez rouge et un paquet de mouchoirs dans les mains que les spectateurs s'extirpaient de la salle noire dans laquelle était présentée The Fault in Our Stars aujourd'hui. Comme j'ai pleuré à m'en arracher le coeur dans My Sister's Keeper et pour bien d'autres productions dépeignant le destin tragique d'enfants malades, je faisais partie de ces braillards qui tentaient de cacher maladroitement leurs sanglots sous des lunettes fumées. Mais attention, pleurer dans un film ne signifie pas que le film est réussi. Des adolescents qui meurent du cancer c'est horriblement triste, des adolescents amoureux qui meurent du cancer, ça l'est encore plus, et des adolescents amoureux et lucides qui meurent du cancer, c'est déchirant pour l'âme de n'importe quel romantique.
Ce n'est donc pas parce que The Fault in Our Stars fait pleurer qu'il est réussi. Le film de Josh Boone est réussi parce qu'il est cinglant, drôle, attachant et touchant. Parce que ses protagonistes, principalement Hazel, sont délicieusement cyniques et réalistes. Ils ne nous laissent pas croire naïvement qu'ils survivront à la fin de ce film, que l'épilogue du conte de fées est possible même pour les gens dont le corps est infesté de milliers de métastases, non, ils sont durs et honnêtes, et c'est exactement ce qu'on attendait d'eux. Les personnages secondaires sont également sévères et adorables. Ce jeune à qui ont vient d'enlever le deuxième oeil et qui vit une peine d'amour difficile apporte de l'espoir derrière ses lunettes noires, et cet animateur de pastoral groupe d'entraide nous amène à croire d'emblée qu'on peut rire de tout, même de la maladie et de la mort.
La chose qui était la plus inquiétante avec The Fault in Our Stars c'était qu'il prenne une tendance mélodramatique et fleur bleue, étouffant ainsi le message et la comédie. Même si l'oeuvre est beaucoup moins cucul que bien d'autres avant elle et qu'on ne nous enfonce pas le romantisme jusqu'au fond de la gorge, nous privant ainsi du reste de la production, il persiste tout de même certains instants clichés, que la foule adolescente trouve le moyen de souligner par des « aaaaahhhh » synchronisés et harassants. C'est donc dans la deuxième moitié que les propensions vers le mélo s'intensifient, et que la fraîcheur de la première partie perd de la valeur.
Mais, restons réalistes ici, ce n'est pas parce que la - méchante - critique souligne les lieux communs que les jeunes filles (public cible de ce film) ne se bousculeront pas dans les salles de cinéma pour s'approprier l'histoire d'Hazel et d'Augustus. L'efficacité perdure puisqu'on s'adresse à une audience qui aime le cliché, qui apprécie les textos mignons que s'envoient les deux amoureux, leur premier baiser dans des circonstances hérétiques, et le fait que leur amour traversera la mort. Ces petites citations stéréotypées du genre : Si on veut voir l'arc-en-ciel, il faut accepter la pluie ou La souffrance exige d'être ressenti, sont aussi des éléments qui plaisent à ce public, alors pourquoi s'en priver?
The Fault in Our Stars est efficace, pas parce que les reniflements étaient les seuls bruits qu'on pouvait entendre lorsque le générique s'est enclenché, mais parce qu'il a accepté de présenter un personnage imparfait et de se moquer - toujours avec un très grand respect - de choses qui sont généralement inattaquables. The Fault in Our Stars sera très certainement le Promenade inoubliable d'une nouvelle génération, et eux, ils n'auront même pas à supporter Mandy Moore...