Quatre années après son sympathique Les scènes fortuites, Guillaume Lambert retourne au cinéma par l'entremise de Niagara, une nouvelle comédie dramatique familiale qui sait divertir à défaut de laisser des souvenirs impérissables.
Le décès soudain du patriarche pousse trois frères (François Pérusse, Éric Bernier et Guy Jodoin) à reprendre contact pour panser les plaies du passé. Un road trip qui va les aider à voir la vie - et la famille - d'un autre oeil.
À partir d'une prémisse qui ressemble au stéréotype par excellence du film québécois, Guillaume Lambert propose un long métrage mélancolique, qui alterne constamment entre les genres. La comédie, quelque peu appuyée, prend une forme parfois surprenante. Si elle ne fonctionne pas toujours comme prévu, elle arrive à se développer par les situations souvent rocambolesques. L'idée de génie du cinéaste est d'avoir convié trois acteurs au style d'humour complètement différent. Entre les jeux de mots de François Pérusse, la performance physique d'Éric Bernier et la présence pince-sans-rire de Guy Jodoin, il y a de quoi rejoindre tous les publics.
La portion dramatique, elle aussi un peu inégale, atteint son apogée à mi-chemin du récit, lors d'errances qui permettent aux personnages féminins - malheureusement tous secondaires - de se faire valoir. C'est le cas de la chanteuse Véronic DiCaire, étonnante dans un contre-emploi, de l'humoriste Katherine Levac et de notre Passe-Partout nationale Marie Eykel. De quoi éclipser les vedettes masculines qui ont davantage de difficulté à véhiculer l'émotion. Cela arrive la plupart du temps à François Pérusse qui semble offrir un non-jeu, se laissant porter par la simple tristesse de son regard. Au moins, il y a suffisamment de clins d'oeil à son oeuvre pour satisfaire ses fans.
Ancré dans une symbolique d'eau (les chutes d'eau, la chute des héros) et de lumière (quitter les ténèbres de la colère pour rejoindre l'espoir de jours meilleurs), Niagara propose une mise en scène plus que satisfaisante, autant au niveau de la photographie soignée que des choix musicaux appropriés. L'ensemble morcelé en chapitres permet de jongler avec les thèmes, les enjeux et même les types d'humour.
Le choix du road movie affiche toutefois ses limites. Après une première partie urbaine assez réjouissante et une seconde qui permet d'aller un peu plus en profondeur dans le mal-être des âmes en place, la dernière épouse le rythme plus lent de la nature et le ton tombe complètement au neutre. Sans doute qu'il faut des temps d'arrêt pour filmer la solitude et c'est justement ce que permet le cinéma. Sauf que dans ce cas-ci, les silences n'amènent pas toujours quelque chose aux propos en place.
En offrant un regard doux-amer sur la quête de rédemption de ses protagonistes, Niagara touche une corde sensible. L'effort pourrait paraître prévisible et pas totalement réussi, mais c'est justement dans ses gaucheries qu'il séduit le plus, affichant une authenticité propre à son auteur qui est peut-être plus à l'aise dans un format court, que ce soit Audrey est revenue et L'âge adulte.