Encore une comédie musicale de Broadway adaptée au grand écran! Hollywood en fait une spécialité, et depuis la renaissance du genre (avec Moulin Rouge! en 2001) chaque saison des Fêtes a sa comédie musicale. La meilleure du lot depuis : Chicago de Rob Marshall. Qui est justement - quelle coïncidence! - à la barre de Neuf, la dernière en lice. Un film prometteur, qui pouvait compter sur une distribution stellaire, et qui déçoit dans presque tous ses aspects. Rien à voir, donc, avec le succès de Chicago.
Le légendaire réalisateur italien Guido Contini prépare à Cinecitta son nouveau film après deux flops consécutifs. Il a un titre, des décors, des costumes et une actrice principale, mais pas de scénario. Alors que la presse et son producteur essaient de savoir de quoi parlera le film, Guido se réfugie dans un hôtel éloigné pour pouvoir travailler en paix. Sa maîtresse vient le rejoindre, mais bientôt son producteur et toute l'équipe du film le trouvent et viennent aussi s'installer avec lui. Puis, sa femme, une ancienne actrice qui a mis de côté sa carrière pour son mariage, vient aussi le rejoindre à l'hôtel. Désespéré, Guido essaie de trouver chez ces femmes qui l'entourent l'inspiration nécessaire pour terminer son scénario.
Pastichant sans grande inspiration le récit de 8 ½, Neuf ne séduit que partiellement. D'autant que les numéros musicaux, qui devraient être une plus-value, ne servent qu'à récapituler ce qu'on sait déjà : mon mari fait des films, les Italiens sont sexy, les réalisateurs couchent avec leurs vedettes, etc. Les numéros musicaux sont au centre du récit, mais puisqu'ils interrompent le récit au lieu de l'enrichir, ils en diluent l'efficacité. Certains numéros sont monotones, manquent de rythme, et les autres atteignent souvent des sommets de mièvrerie… Une émotivité propre à la chanson, ici presque complètement absente, faussée, dans certains cas, par les larmes de (la ravissante) Marion Cotillard ou par les chirurgies de (l'ancestrale) Sophia Loren.
Il y a pire : les paroles des chansons sont d'une simplicité déconcertante, et on doit se rendre à l'évidence : l'anglais n'est pas une langue particulièrement musicale, surtout quand les comédiens imitent malhabilement un accent italien. Alors que les chansons qui agrémentaient Chicago appuyaient les moments forts du film – en grande partie grâce aux talentueux comédiens -, celles de Neuf expriment bêtement des évidences émotionnelles et compliquent inutilement le récit presque vaudevillesque.
Daniel Day-Lewis, qu'il soit torturé ou amoureux, est sur le pilote automatique, recyclant au passage tous les clichés d'une interprétation maniérée (on croirait voir Nicolas Cage). Dommage qu'un si grand acteur, assez audacieux pour se lancer dans une comédie musicale, ne puisse y laisser sa marque. Ses co-vedettes, de Judi Dench à Kate Hudson et Fergie, sont toutes satisfaisantes, sans plus, accablées de numéros sans rythme et sans passion. À l'exception d'Hudson, qui livre la performance la plus dynamique du groupe avec « Cinema Italiano », la seule qui ait une véritable chorégraphie signifiante. Car la danse est un moyen d'expression, comme le cinéma, et c'est souvent l'utilisation d'objets évocateurs (le sable, par exemple), ou l'éclairage de scène intégré à la réalité, qui y ajoutent une puissance émotionnelle que les récits conventionnels ne peuvent atteindre. Ici, rien n'y fait.
Un film prometteur, qui pouvait compter sur une distribution stellaire, et qui déçoit dans presque tous ses aspects. Rien à voir, donc, avec le succès de Chicago.
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