Présenté dans une panoplie des festivals à travers le monde, Snow and Ashes est une nouvelle preuve que le cinéma québécois - en tant que cinéma et pas seulement en tant qu'industrie - se porte bien et offre une belle diversité des sujets et des points de vue. Et ce sera peut-être l'exemple qui manquait pour que les réalisateurs québécois s'intéressent à des sujets plus « grandioses » (c'est-à-dire plus internationaux) que les histoires familiales de familles québécoises au Québec. Surtout les indépendants, qui ont une liberté de création rare qu'il faut chérir et utiliser à bon escient.
L'aspect inédit du sujet de Snow and Ashes est d'ailleurs essentiel à son succès. La quête de ces deux journalistes de guerre envoyés dans une mission dangereuse dans un pays en guerre (qui n'est jamais nommé) aborde des thématiques aussi diversifiées que complexes : pourquoi risquer ainsi sa vie? Comment raconter ce qu'on a vécu? À quoi bon raconter? Le mélange de tous ces thèmes (amnésie, triangle amoureux, etc.) pourrait être cahoteux - comme l'est d'ailleurs la caméra, qui s'imprègne de l'ambiance « guérilla » du conflit pour suivre les personnages dans la zone de guerre - et pourtant, le résultat s'avère étonnamment signifiant.
Ce récit, qui prend quelques minutes avant de s'amorcer véritablement, devient vite palpitant dans un dénouement savamment conçu et monté, entre deux lieux et deux espaces temporels. Cela n'empêche pas que quelques scènes peuvent sembler futiles (en particulier celle avec Jean Lapointe), mais, en général, on a trouvé le bon mélange entre la caméra, nerveuse, et le montage, révélateur, pour clore un récit qui met en vedette deux personnages principaux bien cernés et inédits.
Rhys Coiro et David-Alexandre Coiteux les incarnent avec justesse, étant à la fois les moteurs et les victimes du récit; ce qui ajoute déjà une complexité supplémentaire à leurs personnages. Sans doute parce qu'il a le temps à l'écran, Coiro paraît plus naturel que son collègue, à la fois dans son désarroi que dans cet instinct de survie qui le meut. C'est grâce à lui, sans doute, que la déconstruction narrative du film - qui aurait dû, en théorie, en diminuer l'impact - se trouve renforcée par les nombreux flash-backs. Le fait de ne pas avoir à se demander qui survit change aussi notre perception des événements et modifie nos attentes... pour le mieux.
Visuellement, le film est magnifiquement photographié par Jean-François Lord. Cependant, la multiplication des effets de style (rack focus, jump cut) et les banalise leur fait perdre leur puissance dramatique, même lorsque l'heure est à l'introspection. Tous les éléments sont présents pour un drame poétique et réflexif pas comme les autres. On peut aisément trouver dans Snow and Ashes le début de quelque chose de cinématographique, d'une démarche dédiée à un médium qui, au-delà des maladresses, requiert ce type de respect.