Mud de Jeff Nichols était en compétition officielle au Festival du film de Cannes l'an dernier. C'est seulement à l'ouverture de l'édition suivante que le long métrage américain prend l'affiche sur nos écrans. Malgré sa longueur - 2 heures 10 minutes - et son rythme plutôt lent, Mud nous offre une réflexion intéressante sur la vie, l'espoir et surtout, sur l'amour. Un amour vu à hauteur d'enfants avec toute la naïveté, la candeur et l'optimisme qui s'y rattache.
L'histoire de ce criminel caché sur une île pour échapper aux autorités qui le recherchent pour le meurtre d'un homme n'est pas particulièrement fascinante, c'est la manière dont elle nous est amenée qui fait sa singularité. Un adulte censé aurait retrouvé un meurtrier sur une île déserte et l'aurait probablement dénoncé, mais pas un enfant qui croit que l'amour immuable qu'il porte pour sa copine mérite sa rédemption. C'est par la fragilité de l'enfant que le film est porté, par la douceur de l'innocence. Les textes sont également écrits dans cette optique de fragilité et de bonhomie. Certains dialogues peuvent sembler superflus mais chacun d'eux apporte une dimension nouvelle ou renforce la précédente. Tout est réfléchi, rien n'est laissé au hasard.
Nichols a su convaincre bien des critiques de l'ampleur de son talent grâce à ses deux oeuvres précédentes - Shotgun Stories et Take Shelter - et Mud ne fait que confirmer son intelligence cinématographique. La manière dont il approche la mise en scène, le cadre et même la direction d'acteurs transparaît à l'écran et apporte à ses films une couleur différente, à la fois soignée et hypnotique. Mud est un film long et lent, comme l'est l'écoulement d'un fleuve tranquille; l'image est facile à faire, je sais (le long métrage se déroule aux abords du Mississippi), mais elle n'en devient pas moins vibrante d'éloquence.
La perception favorable qu'avait le public envers le talent de Matthew McConaughey n'est que confirmée, et même accrue grâce à cette performance magistrale qu'il nous livre dans Mud. Son accent sudiste et ses expressions savoureuses ne font qu'accentuer la sympathie des cinéphiles pour ce personnage, d'emblée plutôt rustre et inadapté. Le jeune Tye Sheridan, que l'on avait découvert en 2011 dans The Tree of Life de Terrence Malick, est vibrant de vérité et d'éloquence. Jacob Lofland, qui incarne l'ami du jeune protagoniste, est également d'une justesse indéniable.
La finale trop « bonbon », trop doucereuse, sonne comme une incohérence face à l'absence d'issue présentée tout au long du récit. Encore là, on peut le voir comme un enfant avec l'espoir d'une vie meilleure, une perception qui n'est pas écorchée par l'objectivité et la sévérité de l'adulte. Une question de point de vue probablement...