À quoi bon se forcer à créer une adaptation satisfaisante d'un jeu vidéo si on peut seulement s'adresser aux fans? C'est ce que propose cette relecture de Mortal Kombat, pour le meilleur comme pour le pire.
Dans les années 90, il fallait choisir son camp. Soit on était fan de Street Fighter 2 avec ses personnages colorés ou on était adepte de Mortal Kombat qui nous faisait sentir plus vieux grâce à son surplus d'hémoglobine. C'était l'un ou l'autre, mais rarement les deux.
Tout le contraire de leurs incarnations cinématographiques qui s'avéraient décevantes. Que l'on optât pour Jean-Claude Van Damme dans l'assommant Street Fighter ou la tiède proposition kitch de Paul W.S. Anderson (qui a fait mieux par la suite avec Resident Evil et Monster Hunter) sur MK, l'ennui était palpable tant l'essence originale n'y était pas. Le plus pénible fut toutefois le catastrophique Mortal Kombat: Annihilation en 1997 qui donnait le goût de ne plus jamais penser à ce jeu culte.
Depuis il n'y a plus rien eu. Pendant que les suites se sont succédé sur les différentes consoles (Mortal Kombat 11 a vu le jour il y a deux ans), les tentatives demeuraient infructueuses au cinéma. Jusqu'à un court métrage de 2010 scénarisé par Oren Uziel. Ce dernier a participé à l'histoire de ce troisième long métrage qui débarque presque trois décennies après la création de la célèbre franchise.
Cela ne prend que quelques minutes pour constater que cette production est bien différente des précédentes. Le ton a changé, devenant plus sombre et violent. Pour son premier long métrage, Simon McQuoid a travaillé les textures afin de créer un visuel qui est enfin à la hauteur. Tout est une question de direction artistique (l'introduction hyper soignée!) et surtout d'effets spéciaux généralement convaincants, qui pallient son manque de vision globale, notamment dans son utilisation cacophonique de la musique.
Le réalisateur n'a pas lésiné sur le gore, les scènes de violence et de démembrement, sans toutefois offrir le grand carnage annoncé (le film peut être vu par un public de 13 ans). Un montage parallèle élaboré permet d'ailleurs de multiplier les bagarres de l'Apocalypse afin d'en avoir encore plus pour son argent.
En fait, le long métrage semble avoir été conçu uniquement pour satisfaire l'admirateur nostalgique de la première heure et l'adolescent en mal de sensations fortes. Pourquoi développer des arcs narratifs qui ont du sens, offrir un rythme soutenu et explorer même sommairement la psychologie des personnages si on peut miser sur une (sur)abondance d'affrontements spectaculaires?
Ce sont évidemment les chorégraphies musclées et l'obsession de l'hémoglobine qui mènent le bal. Pas surprenant alors de retrouver James Wan (des séries Saw et The Conjuring) dans la chaise du producteur, lui qui aime tant ces scénarios un peu débiles de mondes divisés, de combats infernaux entre le Bien et le Mal.
En multipliant les hommages et les clins d'oeil, en ramenant les figures les plus connues, on s'assure d'avoir un peu de tout pour tout le monde. Peu importe si le tortionnaire Sub-Zero, la courageuse Sonya Blade, le fougueux Liu Kang, le manipulateur Kano, le mystérieux Scorpion et l'imposant Goro sont inexpressifs. L'important est de les voir souvent en action et ils seront toujours plus intéressants que le pauvre nouveau héros sans charisme ni conviction Cole Young. Même lorsqu'ils passent leur temps à parler, à expliquer encore et toujours les tenants et aboutissants de l'intrigue simpliste qui, en cas de succès, risque d'engendrer une tonne de suites... C'est à se demander toutefois comment l'irrésistible acteur Tadanobu Asaso a pu se laisser convaincre d'incarner le fantastique Raiden, si ce n'est pour marcher dans les traces de Christophe Lambert.
Sans doute que cette série B aurait pu aller encore plus loin en offrant davantage de séances sanglantes. Le ton est beaucoup trop sérieux pour son - et notre - propre bien et le divertissement finit par stagner, lassant ici et là. Pourtant les gens qui ont cette licence tatouée sur le coeur n'auront pas trop l'impression de perdre leur temps... surtout en la découvrant au cinéma. Enfin une adaptation de jeu vidéo qui offre un tant soit peu de l'âme que l'on pouvait retrouver dans les arcades, à tenter pendant des heures la parfaite exécution de mouvements afin d'offrir le « Finish Him » le plus mémorable.