Les films de superhéros se suivent et ne se ressemblent pas. Alors que le fan du genre est encore sur un nuage après le triomphe de The Batman, il risque de déchanter complètement devant Morbius qui apparaît comme une des pires créations cinématographiques de Marvel.
Reporté à de multiples reprises, ce dérivé sur un ennemi de Spider-Man croule sous les clichés. Il y a le gentil biochimiste (Jared Leto) qui se transforme en vilain en voulant faire le bien, sa difficulté à contrôler la bête qui sommeille en lui, une amitié (avec Matt Smith) qui tourne mal, une histoire d'amour peu féconde, des policiers qui suspectent la mauvaise personne, etc. On n'a qu'à changer le héros - ici un homme devenu vampire qui a soif de sang - et on obtient une création générique et interchangeable comme il y en a tant.
Fallait-il s'attendre à autre chose du tandem derrière les scénarios des navrants Dracula Untold, The Last Witch Hunter, Gods of Egypt ? Tout le potentiel des bandes dessinées est écarté au profit d'une intrigue superficielle et ennuyante au possible, que ne peut relever l'omniprésente et tonitruante trame sonore de Jon Ekstand. Pourquoi choisir entre les éléments fantastiques, psychologiques et horrifiques si on peut simplement les combiner n'importe comment? Encore là, les pistes valables sont rapidement abandonnées, comme de jouer à fond la carte gothique ou de miser sur la relation d'amour et de haine entre les deux protagonistes masculins qui aurait pu donner une version contemporaine de Interview with the Vampire.
Seules les scènes d'action demeurent potables. Le réalisateur Daniel Espinosa excelle en la matière - comme en font foi ses trépidants Easy Money et Safe House - et il offre le minimum requis, sur fond de ralentis et d'hémoglobine. Dommage que les effets spéciaux pitoyables viennent tout gâcher. Les séances de métamorphoses sont tellement hideuses qu'elles finissent par faire hurler de rire.
Ce n'est rien pour mettre en valeur Jared Leto, qui a déjà été un bon acteur à l'époque de Requiem for a Dream ou Dallas Buyers Club, mais qui se prend beaucoup trop au sérieux depuis Suicide Squad. Pas surprenant qu'il vienne de recevoir un Razzie pour sa performance ridicule dans House of Gucci. En gentil méchant (à moins que ce soit le contraire), il apparaît blasé, manquant singulièrement de charisme. À l'image de tous les comédiens qui l'entourent.
S'il s'avère plus court que les autres productions du même genre, ce long métrage ne semble qu'un avant-goût pour une suite. Les deux scènes dans le générique final annoncent d'ailleurs une alliance qui risque de donner du fil à retordre à l'homme-araignée. Sauf que ces aventures ne se concrétiseront probablement jamais. Les Marvel signés Disney livrent la marchandise et le très divertissant Spider-Man: No Way Home en est un exemple éclatant. Qu'aurait-il à gagner en jouant dans les plates-bandes des Marvel de Sony Pictures qui sont largement inférieurs? Après les deux abrutissants tomes de Venom, Morbius enfonce encore davantage le clou de la médiocrité.