Il y a des récits tellement édifiants qui ne peuvent qu'être véridiques. C'est le cas de cette amitié entre une soldate - la Megan Leavey du titre - et son chien pisteur Rex qui a du Rintintin dans la truffe. Rien ne peut les séparer, ni la guerre ni les injustices chroniques de la vie.
Tout cela est bien beau. Mais comment en tire-t-on un film? En embauchant trois scénaristes, dont Pamela Gray, la spécialiste des histoires vraies (Conviction, Music of the Heart). Ce n'est toutefois pas un signe de succès et l'introduction assez maladroite matinée d'une voix hors champ inutile le rappelle rapidement. Dès le début, on insiste sur les bienfaits de s'engager pour aller au front et servir son pays. Il n'y a rien de mieux que d'être un héros, surtout s'ils sont bien traités. De la propagande impérialiste qui reviendra périodiquement jusqu'à une finale particulièrement assommante.
Une fois que notre protagoniste décide de se joindre aux Marines, elle recevra l'entraînement attendu et maintes fois vu ailleurs. Cela donne étrangement des situations cocasses et légères, avec quelques gags qui agissent comme leitmotivs (le baseball demeure le plus satisfaisant). Megan n'aime pas particulièrement le genre humain et elle semble être la seule capable d'apprivoiser Rex, qui a de sérieux problèmes de comportement. Moins toutefois que la cauchemardesque figure canine de White Dog et en autant de temps qu'on puisse dire Turner & Hooch, ils deviendront les meilleurs amis du monde.
Tout ce qui manque à partir de là est une réalisation digne de ce nom, par exemple de Ridley Scott de l'époque G.I. Jane. Gabriela Cowperthwaite a prouvé avec son précédent et très bon documentaire Blackfish qu'elle avait la cause des bêtes à coeur. Cela ne rend pas sa mise en scène plus intéressante, surtout qu'elle sort rarement de l'ordinaire. C'est d'autant plus évident lorsque l'action se transporte en Irak. Les séquences de combats manquent trop souvent de tension et de puissance dramatique. Il ne faut surtout pas s'attendre à un War Horse avec un berger allemand.
Le long métrage se regardait jusque-là sans passion ni ennui. C'était avant que le troisième et dernier acte vienne tout saborder. Lorsque la soldate rentre aux États-Unis, elle semble complètement perdue et l'effort cinématographique l'est autant qu'elle, divagant à gauche et à droite, cumulant les rencontres vaines avec des personnages secondaires qui ne servent à rien. Tout est abordé en surface, surtout le trouble de stress post-traumatique. On n'avait pas besoin de tomber dans les excès d'un Kim Ki-duk (The Coast Guard!), mais seulement de ressentir quelque chose envers l'héroïne. C'est peine perdue. En revanche, il y a une abondance de segments mélodramatiques et manipulateurs où Megan et Rex pleurent à l'écran, avec ou sans ralentis, sur fond de musique dégoulinante.
La performance de Kate Mara empêche toutefois le spectateur de rejoindre les bras de Morphée. Même si elle n'a jamais été une grande actrice, celle qui pourrait très bien être la grande soeur d'Emma Watson excelle lorsqu'elle doit jouer des rôles peu expressifs. Ce fut le cas dans Morgan et ici où l'on sent parfaitement son service militaire irradier de son corps. Ses meilleurs moments sont ceux avec Rex, véritable bougie d'allumage poilue de l'entreprise.
À peine moins gnangnan que le récent A Dog's Purpose, Megan Leavey aborde un sujet prometteur de façon monocorde et appuyée. Si on n'a rien à redire sur le duo en place, tout ce qui l'entoure manque de consistance, de résonance et de mordant. Seuls les amateurs de bêtes à quatre pattes et/ou de guerre risquent d'y trouver pleinement satisfaction. Encore là, rien n'est moins sûr. Même les chiens de la Fondation MIRA, présents dans la salle de cinéma lors de la première du film, avaient décroché avant la fin.