Il y a des films qui n'existent que pour mettre en valeur une tête d'affiche. C'est d'autant plus flagrant chez ces excellentes actrices qui fêteront bientôt leur 70e anniversaire et qui ne trouvent plus de rôles à leur mesure. C'était le cas de Meryl Streep pour Ricki and the Flash, de Sally Field pour Hello, My Name is Doris et maintenant de Susan Sarandon pour The Meddler. Trois longs métrages terriblement ordinaires qui n'ont pratiquement qu'une seule qualité : leur vedette.
Fidèle à ses habitudes, Susan Sarandon est magistrale en mère qui se sent inutile depuis la mort de son mari et qui tente de jouer un rôle actif dans l'existence de sa fille (Rose Byrne) scénariste et déprimée. La comédienne trouve au cinéma son personnage le plus intéressant depuis des lustres. Elle est parfaite en femme bien intentionnée, mais envahissante, dont la sincérité l'amènera vers le bonheur malgré les tracas du quotidien. Sa prestation n'équivaut évidemment pas à ses sublimes Dead Man Walking, Thelma & Louise et Atlantic City, ce qui ne l'empêche pas d'offrir une composition franche et attachante.
La talentueuse interprète est si admirable que le fossé devient énorme avec ses autres partenaires de jeu. Rose Byrne (qui joue un rôle pivot dans le très divertissant X-Men: Apocalypse) en fait des tonnes et l'être qu'elle campe s'avère profondément énervant. Elle n'obtient pas le temps requis pour se faire valoir à l'écran, finissant par être bien secondaire aux enjeux. C'est le cas de tous les personnages unidimensionnels qui croiseront la route de l'héroïne, dont J.K. Simmons (le méchant prof de Whiplash) qui aurait mérité un meilleur sort.
Le script de Lorene Scafaria qui était si bien fignolé sur le mignon Nick & Norah's Infinite Playlist (bon, il s'agissait d'une adaptation d'un livre) affiche ici ses limites. Chaque situation ou rencontre absurde débute d'abord sur un léger air comique qui n'est pas désagréable pour muter ensuite vers le drame existentiel et moralisateur teinté de romance. L'ombre du mélo plane sur le récit et ses ficelles finissent par faire rire involontairement tant elles sont apparentes. L'exemple le plus flagrant est le sort lié à cette femme malade que vient voir régulièrement notre protagoniste. Rappeler les vertus de la famille et célébrer la nécessité des mères d'exister pour elles et pas pour les autres est admirable. Faut-il seulement le faire subtilement en ne réunissant pas toujours les mêmes clichés que les spectateurs ont déjà vu des dizaines et des centaines de fois (au hasard, pensons à l'oscarisé Terms of Endearment, où la vénérable Shirley MacLaine défendait un rôle similaire à Sarandon).
Scafaria n'a pas appris de ses erreurs sur son précédent Seeking a Friend for the End of the World et elle offre une nouvelle mise en scène ennuyante et approximative. La réalisatrice sait comment mettre en valeur les charmes de sa vedette et c'est à peu près tout. Sauf qu'on est au cinéma, où le montage et la musique ont leur importance, tout comme le cadrage, la composition des plans et la façon de filmer. Plusieurs éléments accessoires qui font défaut au langage de la cinéaste.
C'est vrai qu'à côté de l'horrible Mother's Day, The Meddler est presque bon. Tout devient supportable en le comparant à ce navet incontestable. La réalité est pourtant toute autre et en omettant la performance pleine de fraîcheur de Susan Sarandon, on obtient une production franchement oubliable. Sans elle, il n'y aurait jamais eu de film. Ça n'aurait peut-être pas été plus mal.