Les seigneurs de Dogtown est un film qui dégage de la maturité, aussi incroyable que cela puisse paraître. Derrière cette jeunesse insouciante et ces carapaces se cachent des personnages mûris, qui ne sauvent malheureusement pas la mise d'un pari risqué. Les seigneurs de Dogtown ne trouvera jamais son public.
La réalisatrice Catherine Hardwicke (Treize ans) s'attaque au mythe des Z-Boys, les pères de la planche à roulette, des surfeurs audacieux qui ont su exploiter leur art et qui sont devenus des légendes. Parce que Les seigneurs de Dogtown balance entre le film pour adolescents de saison et la vraie rétrospective rigoureuse, il ne trouvera jamais d'audience, les uns le trouveront trop simple et les autres trop complexes, dans l'ordre ou dans le désordre.
Le travail de Hardwicke, d'ailleurs, est marqué par cette immaturité du film, il est indécis, désorienté et laisse perplexe. Comme si la caméra ne pouvait jamais saisir l'essence du récit, elle le cherche en regardant à gauche et à droite sans arrêt, pour laisser une vague impression de confusion inappropriée, un peu à la manière de Treize ans, où l'effet était plus convaincant. Les scènes de planche sont enlevantes, certes, appuyées par les notes de Pink Floyd, mais ne sont rarement autre chose que des prétextes pour faire des acrobaties. Pas de passion dans ces scènes, comme si la réalisatrice préférait filmer les ébats amoureux de jeunes insouciants.
Les trois acteurs principaux, John Robinson (Elephant) et Emile Hirsh (La fille d'à-côté) en tête, portent le film sur leurs épaules grâce à des performances précises, plus terre-à-terre que l'ensemble du film, caractérisées par une séduisante assurance qui leur permet de briller. Le travail sur leurs personnages est manifeste, leur rigueur professionnelle aussi, et ils volent littéralement la vedette.
Le scénario de Stacy Peralta (un membre des Z-Boys) balance entre la légèreté et la nonchalance de la jeunesse et le mélodrame au premier coup d'œil, mais semble plutôt le compte rendu exhaustif d'une expérience de vie, ce qui le rend à la fois plus pertinent et plus touchant. Un bon mélange qui permet d'installer un rythme tout à fait approprié. La lacune principale est la structure, cependant, où certains éléments auraient mérité plus d'importance qu'il en ont reçu. Dommage que les personnages restent des personnages, qu'ils, et leurs destins, ne prennent jamais d'importance dans l'esprit du spectateur-observateur, même de bonne volonté. D'un autre côté, dans leur environnement, les personnages ne sont jamais unidimensionnels, ils sont complets et leurs interactions ont cet aspect réaliste nécessaire au bon déroulement de l'histoire. Reste que Les seigneurs de Dogtown est un film sur l'amitié plus que sur les sports extrêmes.
L'esprit frivole dans le traitement de Les seigneurs de Dogtown rebutera quelques spectateurs, les autres décrieront son aspect mélodramatique et le sérieux caché de son propos. Le film ne semble s'adresser à personne, comme un journal intime, et même ses qualités techniques ne peuvent sauver la mise. Indécis, hésitant et flou comme la jeunesse qu'il dépeint, Les seigneurs de Dogtown est condamné à la noirceur d'un tiroir et à l'incompréhension générale. Ce qui ne l'empêche pas d'être un film d'été agréable.
Les seigneurs de Dogtown est un film qui dégage de la maturité, aussi incroyable que cela puisse paraître. Derrière cette jeunesse insouciante et ces carapaces se cachent des personnages mûris, qui ne sauvent malheureusement pas la mise d'un pari risqué. Les seigneurs de Dogtown ne trouvera jamais son public.
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