Hollywood est en mode « nostalgie » depuis quelques années. Avec ses Transformers, ses G.I. Joe, ses Tron et ses Astro, il tente de toucher le coeur - et le porte-monnaie - des nostalgiques. Il n'est donc pas étonnant de voir apparaître sur nos écrans ces petits êtres bleus rieurs qui ont marqué plusieurs générations d'enfants à travers le monde. Mais, même si la schtroumpfroduction a recours à des personnages connus et aimés du public en plus d'utiliser une technique qui a prouvé sa valeur récemment (le mélange de l'animation et des acteurs réels a été très profitable pour les Chipmunks et tous les grands studios aspirent à un succès comparable), la partie est loin d'être gagnée d'avance.
Lorsqu'on s'attaque à une icône comme les Schtroumpfs, on se doit de respecter la mythologie qui les entoure - monde réel ou pas, en laissant toute la place à de nouveaux jeunes spectateurs qui découvrent leur univers. Les créateurs chez Sony Pictures semblent avoir porté une attention particulière à cette donnée - et nous en sommes schtroumpfonnaissants - puisque les personnages - de la Schtroumpfette au Grand Schtroumpf en passant pour le Schtroumpf coquet et le Schtroumpf farceur - sont aussi schtroumpfants et candides que dans nos souvenirs. Leurs chants et leur gaieté incessante (qui est souvent inhibée par l'exaspération du Schtroumpf grognon) finissent par importuner l'adulte, mais hypnotisent l'enfant. Gargamel est également à l'image du sorcier schtroumpfimpotent et tyrannique imaginé par Peyo. Même si nous sommes loin de la performance schtroumpformidable, Hank Azaria se débrouille assez bien dans le costume défraîchi du cruel magicien. Neil Patrick Harris et Jayma Mays sont quant à eux assez effacés, leur utilité au sein du récit reste discutable. On avait besoin d'adjuvants humains, d'individus qui recueilleraient les Schtroumpfs et les aideraient dans leur quète, certes, mais fallait-il leur histoire soit si schtroumpfennuyante? Cette allégorie sur la paternité - suis-je prêt à être père, à assumer les responsabilités? - n'avait pas sa place au sein d'un récit aussi ludique. La morale qui y est associée - le Grand Schtroumpf qui discute de ses nombreux enfants sur le toit d'un immeuble new-yorkais - manque de finesse et contexte. La meilleure leçon que les Schtroumpfs peuvent livrer est celle de leur continuelle joie de vivre et de leur entraide inimitable. Les autres ne sont pas nécessaires.
D'incorporer les Schtroumpfs à notre monde est bien évidemment une source de blagues schtroumpfillimitées, mais malheureusement, elles sont loin d'être toutes pertinentes. Les plaisanteries entourant les toilettes, l'urine, les pets ou tous autres sujets primaires de ce genre devraient être proscrites depuis longtemps. Les bambins s'amusent autant de voir les petits êtres bleus déplacer un ours empaillé en tentant d'être subtils que de voir Gargamel sortir indigné d'une toilette chimique, alors pourquoi s'entêter dans cette voie facile et obscène alors que la schtroumpficacité est aussi dans l'intelligence? Il y a également des incontournables lorsqu'on décide de faire visiter notre société moderne aux Schtroumpfs; Google, les voitures, les animaux et tous autres accessoires usuels sont une source intarissable d'humour et, même si parfois ils nous semblent poussés et paradoxaux, nous ne pouvons qu'assumer qu'ils étaient inévitables.
The Smurfs est une oeuvre qui s'adresse principalement aux enfants et dans cette optique, on peut pardonner quelques relâchements narratifs et quelques blagues futiles, qui amuseront sans contredit les bambins. Les grands devraient également y trouver leur compte, si ce n'est que pour renouer avec ces personnages schtroumpfolâtres qui ont bercé leur imaginaire d'enfants. Bien sûr que l'oeuvre à ses égarements et ses failles, mais les petits, je vous l'assure, s'attarderont davantage aux longs cheveux blonds de la Schtroumpfette et aux grands pieds du Schtroumpf maladroit qu'aux limites du scénario.