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Les coulisses d'un tournage
Un peu long
Double immersion.
Au début, on se demande un peu dans quoi on est tombé. « Les Pires » enchaîne les entrevues d’enfants face caméra par ce qui semble être un réalisateur. Documentaire ? Fiction ? Docu-fiction ? Voire même making-of de quelque chose < ? On est un peu perdu et le premier quart d’heure n’est pas franchement emballant. Puis, tout se met petit à petit en place et on comprend que l’on assiste au tournage d’un film, on est plein dans ce qui est presque un sous-genre du septième art : le concept de la mise en abyme ou du film dans le film. Cependant, le long-métrage gardera toujours une ligne de conduite ténue entre le film de fiction et le documentaire enrobé dans cette sorte de best-of de tournage. Non seulement parce que la quasi-totalité des acteurs choisis sont non professionnels mais aussi parce qu’on se demande continuellement si c’est leur vie que l’on filme, un scénario écrit de toute pièces ou un mélange des deux car le long-métrage est agrémenté de scènes de la vie de tous les jours de ses comédiens amateurs et habitants de Boulogne-sur-Mer.
En cela, voici un premier film peu commun qui nous balade dans une sorte de réalisme trafiqué du meilleur effet. Car, oui, « Les Pires » fait partie de ce type de cinéma à la fois naturaliste et social qui se rapproche donc beaucoup du genre du documentaire, où les frontières entre fiction et réalité sont poreuses. Un cinéma que n’aurait pas renié les frères Dardenne pour le côté ultra réaliste et les acteurs non professionnels (surtout qu’il se déroule dans le Nord de la France), Ken Loach pour l’aspect analyse du microcosme social ou encore le Laurent Cantet de « Entre les murs » pour le travail documentaire sur les enfants. Le film aurait pu être voyeuriste ou misérabiliste en choisissant d’investir une cité désœuvrée du Pas-de-Calais et ses habitants. Il l’est sans le vouloir a quelques reprises mais on sent que ce n’est pas fait exprès et que la majorité du long-métrage tente, à l’inverse, d’humaniser et de donner du baume à cette communauté. Il y a un vrai regard empli de tendresse et d’empathie. Une séquence vers la fin ouvre d’ailleurs intelligemment le débat à ce sujet.
Sans que l’on s’en rende compte, on s’attache à tous ces personnages, que ce soit l’équipe du film ou à ces enfants et leur famille. On rit avec eux, de leur naturel et de leur gouaille imparable. On est ému aussi par leur désarroi, leurs peurs et leurs douleurs. Tout cela transpire le vrai comme on voit rarement cela au cinéma. Une authenticité dont peu de films peuvent se targuer. Et pour un premier film, on peut dire que le Grand Prix du Jury à la sélection Un Certain Regard à Cannes l’an passé n’a pas été usurpé. Mais que serait « Les Pires » sans cette incroyable distribution d’acteurs non professionnels, des seconds rôles aux quatre premiers. Seul bémol, ils sont tous excellents mais la jeune Mallorry Wanecque vole radicalement la vedette à tous ces petits camarades, avec plus de présence à l’écran, un passif plus fouillé et une énergie qui transpire à travers la pellicule. Elle est magnétique et déséquilibrerait presque le film en phagocytant chaque séquence où elle apparaît. L’oubli impardonnable des Césars du meilleur espoir féminin l’an passé. En tout cas, un bien joli petit film plein de bonnes intentions et au constat social affiné et juste.
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