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La dure réalité des intranquilles.
Ça nous fait apprécier notre santé. Très bon.
La mère de l'intranquilité.
Joachim Lafosse est de retour avec une œuvre qui ausculte toujours la désintégration de la cellule familiale mais par le prisme de la maladie cette fois. Sa filmographie se pare donc d’une cohérence thématique rare. Après l’excellent et magistral « A perdre la raison » qui partait d’un fait divers sordide pour raconter la descente aux enfers d’une famille et le très bon « L’économie du couple » qui insérait la notion d’argent lors d’une séparation, c’est donc cette fois par le biais de la maladie que la famille va être envisagée. Et pas n’importe laquelle puisque c’est d’une pathologie sournoise et insidieuse dont il s’agit ici : le bipolarisme. Si on a déjà vu pas mal de long-métrages parlant du cancer ou encore de la maladie d’Alzheimer (comme le récent « The Father » par exemple), ceux traitant de maladies psychologiques sont plus rares. La dépression a déjà été traitée de manière occasionnelle, mais la bipolarité est bien plus rare. Le réalisateur puise d’ailleurs dans sa propre histoire puisqu’il est lui-même le fils d’un bipolaire. « Les Intranquilles » nous met donc en immersion totale et très réaliste dans la vie d’une famille déchirée par cette pathologie imprévisible.
On a donc d’un côté un Damien Bonnard intense et concerné qui enchaînes les crises faites d’excitation, de créativité et d’hyperactivité suivi d’une phase dépressive et amorphe. Le rôle n’était pas facile et le risque de tomber dans la surenchère et le ridicule était potentiellement important, mais le comédien s’en tire avec les honneurs. En face, il y a sa femme, jouée par Leïla Bekthi dans une prestation plus intériorisée mais tout aussi délicate pour un tel rôle, plutôt passif et pas forcément évident. Deux manières de voir les choses pour un drame fort et intense. Heureusement, « Les Intranquilles » évite l’écueil du film dossier et de la psychologie de bazar. Lafosse a préféré faire ressentir au spectateur de l’intérieur ce qu’était cette maladie et les conséquences qu’elle pouvait avoir sur les autres membres d’une famille. C’est tour à tour tendre et beau puis fiévreux et angoissant. De véritables montagnes russes émotionnelles, aussi bien pour les personnages que pour les spectateurs qui alternent les scènes coups de poing et d’autres plus apaisées.
Cependant, c’est peut-être le film le plus rude de son auteur et le moins accessible. D’abord le script fait le choix de rentrer dans le vif du sujet sans préambule, avec un épisode de crise. On ne sait donc pas quand et comment ça a commencé et on ne le saura jamais. De la même manière, il se termine de manière très abrupte, en pleine crise également, sans qu’on sache comment va évoluer cette famille et ce qu’il va advenir des personnages. Aucune piste n’est vraiment donnée. Particulier et osé mais très frustrant, comme si le préambule et la conclusion avaient été coupés au montage. Ensuite, le film suit un peu les humeurs du personnage principal. C’est peut-être voulu mais on passe donc de séquences chocs et qui captent notre attention de manière incontestable à d’autres plus monotones et anecdotiques, ce qui aboutit à une œuvre au rythme en dents de scie. « Les Intranquilles » n’est donc pas le meilleur film de son auteur par la faute de choix audacieux mais clivants. Cela ne l’empêche pas d’être sporadiquement puissant et passionnant et surtout nécessaire par la lumière qu’il met sur une pathologie méconnue mais très invalidante.
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