Il est souvent un peu injuste de critiquer le second rejeton d'une trilogie annoncée. Pas parce que le film est nécessairement meilleur ou plus mauvais que le premier : cela va dans l'ordre des choses. À la vérité - et il faut bien l'admettre -, le deuxième film de tout triptyque souffrira toujours de la « génétique » de son prédécesseur : les acteurs, en majorité, demeureront les mêmes, la direction artistique, la direction photo et musicale, de même. Aborder le film selon le regard du néophyte ou celui de l'initié, voilà un véritable dilemme! D'un côté, il y a la satisfaction ou la déception en mode mineur, de l'autre, en mode majeur.
Les chroniques de Narnia : Le prince Caspian est, évidemment, la suite de Les chronqiues de Narnia : L'armoire magique. Cette fois-ci, il sera de la responsabilité de Peter, Edmund, Susan et Lucy, les Rois et Reines de Narnia, de secourir leur royaume, tombé sous le joug des Telmarins près d'un siècle plus tôt. Pour ce faire, ils devront réunir l'ancienne armée de Narnia, composée de souris, de centaures, de nains, etc., et s'allier avec le prince déchu des Telmarins, Caspian. Ensemble, ils livreront bataille à Lord Miraz - l'oncle de Caspian - qui est le maître d'oeuvre du coup d'État ayant causé la perte de son neveu.
Les admirateurs du premier volet retrouveront rapidement - et sans véritables mutations - l'univers qu'ils avaient quitté en 2005. Cette fois-ci, et puisqu'il n'est plus nécessaire de justifier l'existence d'un univers parallèle, il ne suffira, au mieux!, que d'un prétexte, pour retrouver l'univers « narnien ». Ici apparaît une première considération d'importance : Narnia 2 n'a pas réellement été pensé pour les néophytes. Ceux qui n'auront pas vu récemment le premier volet auront, peut-être, du mal à restituer l'univers qui leur est présenté; les autres, cependant, jouiront de ne pas avoir à se retaper une histoire qu'ils connaissent déjà très bien, de toute façon.
La trame sonore du film est, une fois de plus, d'une efficacité incroyable. La direction photo, les effets visuels et le montage sont impeccables; on ne s'attend à rien de moins de la part de Disney. Malheureusement - et on ne s'attend à rien de moins de la part de Disney - de nombreuses séquences sont bourrées de clichés narratifs et esthétiques, et le tout devient, de par beaucoup, trop manichéen à force d'être lisse, plane et uniforme.
Évidemment, Narnia est un film pour toute la famille. Par conséquent, il apparaît tout à fait logique de constater des scènes de combats dénuées de violence gratuite et absoutes d'effusions d'hémoglobines extrêmes, comme on l'a régulièrement vu dans la dernière décennie. Voilà qui plaira sans doute à bien des parents! C'est cependant sans compter sur les aptitudes de la caste spectatorielle qui complètera, bien malgré l'abstraction que l'on en fait, la suite d'une ou plusieurs actions données - le meurtre d'un ou plusieurs soldats adverses, sur le champ de bataille, par exemple.
Le fait de couper constamment ces scènes en détournant leur suite logique vers le hors champs, en plus de n'avoir aucune véritable efficience, entendu que le spectateur comblera de lui-même, de toute façon, le trou béant laissé par la narration, est un irritant qui prend de la puissance à chaque seconde qui passe, en devenant le mécanisme singulier d'une castration cinématographique systématique. Ce n'est pas bien méchant, c'est même fait de bonne foi, sans doute?, ça ne fait de mal à personne, bref, ça fait sourire les plus jeunes et ceux qui les accompagnent, et ça fait rager les cinéphiles! Le seigneur des anneaux pour gamins, disait-on?
Armé d'un scénario convenu et d'une distribution d'acteur non mémorable au possible, Les chroniques de Narnia : Le prince Caspian a bien peu de choses à offrir, si ce n'est à ceux qui savent à quoi s'attendre et qui sont prêts à recevoir de gaieté de coeur ce bien peu de choses. Autrement, on se donne rendez-vous dans trop peu de temps pour le troisième mouvement de cette symphonie... en noir et blanc.