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Raisons et sentiments.
Avec ce nouveau film au titre merveilleusement trouvé Emmanuel Mouret revient à la quintessence de ce qui fait son cinéma. Il s’en était éloigné d’un iota avec son plus gros succès public, « Mademoiselle de Joncquières » qui était un calque de ses obsessions retranscrites dans un film en costumes, mais retrouve tout ce qui fait le sel de son cinéma ici. Les jeux de l’amour, l’analyse des sentiments et les aléas du hasard sont ici condensés dans une sorte de film somme de son œuvre. Et il faut avouer que l’homogénéité et la régularité thématique de sa filmographie en font l’un des réalisateurs les plus cohérents. On pense à Alain Resnais ou Éric Rohmer dans la continuité logique et le choix des sujets de ses films, tout comme à un Woody Allen hexagonal. La conséquence négative de ce type d’artiste est qu’on a parfois l’impression d’une déclinaison du sempiternel même film. Que l’auteur n’innove pas et radote en quelque sorte. Mais on prend plaisir tout de même puisque de nouveaux acteurs ou des petites choses anodines viennent casser un peu le côté prévisible et déjà-vu parfois ressenti. Et puis même si l’on n’aime pas, le réalisateur fait ce qu’il fait de mieux et il le fait bien.
On reste donc dans du pur Mouret, du cinéma classique et suranné dans le sens noble du terme, mais parfois bien trop proche du cliché du film parisien d’auteur : bourgeois, hermétique et surfait. Il y a donc de longues scènes de dialogues qui s’enchaînent sous une forme un peu théâtrale, du marivaudage amoureux où hasards et coïncidences sont légion et parfois un peu poussives, des répliques bien trop littéraires et écrites qui sonnent faux, une propension à ne pas savoir couper au montage ainsi que cette impression de redite, tenace. Mais il y a aussi cet art de l’écriture avec des échanges qui sont paradoxalement passionnants et des vérités pleines d’acuité sur les rapports amoureux et les atermoiements des cœurs. Et ici l’auteur nous gratifie d’un montage aiguisé en forme de poupées russes qui permet au récit d’être plus dynamique, aéré et surtout surprenant.
Mouret est un bon directeur d’acteurs et a choisi une distribution jeune pleine de nouveaux talents ou d’espoirs du cinéma français. Un casting plaisant et étonnant, qui sait se fondre dans l’univers du réalisateur mais semble parfois empêtré avec des dialogues peu naturels, comme toujours chez ce réalisateur. Ces échanges très littéraires sont un peu comme une marque de fabrique mais une marque de fabrique qui se ressentait moins sur « Mademoiselle de Joncquières » de par le côté film d’époque. « Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait » ne changera donc pas du reste de sa filmographie et de son univers si personnel et singulier : ceux qui détestent détesteront toujours autant; ceux qui aiment se régaleront encore plus. Quant aux autres, il se satisferont des qualités indéniables du film et passeront outre ses défauts, prévisibles et pas forcément déplaisants. Cela reste du cinéma de qualité, il faut juste savoir y goûter.
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