Ce premier long métrage de Podz est certainement le meilleur Senécal à avoir été porté au grand écran à ce jour. Après Sur le seuil et 5150 rue des Ormes - deux réussites, tout de même -, Les sept jours du talion prouve (au moins) deux choses : Senécal, l'auteur, écrivait déjà pour le cinéma, et Podz, le réalisateur de télévision (Minuit, le soir), réalisait déjà pour le cinéma.
Lorsqu'il dit au revoir à sa fille Jasmine, huit ans, cet après-midi là, le chirurgien Bruno Hamel ne se doute pas qu'il ne la reverra plus jamais. Violée par un récidiviste, la fillette est retrouvée morte. Incapable de supporter la douleur, Hamel décide d'enlever le criminel et de l'enfermer dans un chalet loin de toute civilisation, avec l'intention de lui faire subir des sévices corporels pendant sept jours avant de se rendre.
L'adaptation qu'on a faite du roman est réellement cinématographique; on a réduit au strict minimum les dialogues et les descriptions pour laisser l'image porter les détails nécessaires à la compréhension du film. Un véritable travail, bien fait, qui a aussi évité les nombreux pièges que contenait le roman (dont les aboiements de chiens, savamment remplacés). S'il s'agit de l'une de ses qualités, c'est aussi son principal problème : les quelques dialogues du film sonnent parfois faux, entre autres lorsqu'un père, qui ne peut pas se douter qu'il ne reverra plus sa petite fille, prend le temps de lui dire qu'il l'aime, comme pour rassurer le spectateur : la petite est morte, mais elle savait que son père l'aimait.
Pourtant, on ne peut certainement pas dire que Les sept jours du talion soit un film « rassurant », c'est même tout le contraire. Ce léger accroc marque une brisure de ton, qu'on retrouvera plus tard au dépanneur ou lors de la présence de Diane Masson, mère d'une autre victime aussi enlevée par Hamel. Même problème lorsqu'Hervé Mercure regarde en boucle le vidéo de l'assassinat de sa femme : plutôt que de cerner le personnage, on sort le film du monde du plausible, en soulignant à gros traits des évidences.
Heureusement, ces quelques écarts ne reflètent pas l'ensemble du film, qui s'applique plutôt à montrer la mécanique de la vengeance. Ici, Bruno Hamel n'est pas emporté par les événements, et ses actions sont méticuleuses et préméditées. Du moins au début. Podz, alias Daniel Grou, est aussi habile avec la torture (qui n'occupe même pas la plus grande partie du film) qu'avec l'immense douleur des parents. Au centre de la réussite : Claude Legault, laconique, crédible, dédié, convaincu et convaincant. Les autres comédiens le sont d'ailleurs tout autant, que ce soit Martin Dubreuil, vedette d'une panoplie de courts métrages de toutes sortes, ici soumis au scalpel de Bruno Hamel, ou Rémy Girard, qui trouve ici son rôle le plus stimulant depuis des années, enfin.
En ce sens, la finale est pertinente et respectueuse; trouver un coupable et le juger est si facile qu'on aurait aisément pu se méprendre sur le message si on avait gardé l'équation de la vengeance à sa forme la plus simple.
La violence en choquera certainement plus d'un. On la qualifiera sans doute de « gratuite » ou « d'injustifiée ». Mais la violence n'est jamais justifiée, pas plus au cinéma que dans la vraie vie (n'oublions pas la distinction entre les deux), pas plus que la vengeance ou le viol. Mais toutes ces choses existent, et avant de les comprendre, il faut les observer. Pourquoi ne pas en profiter pour voir Les sept jours du talion et se demander ce qu'on ferait, nous, à la place du père? Et surtout, rejeter la réponse évidente. De la même manière que Children of Men proposait une fin de l'humanité lente et douloureuse (bien plus plausible qu'une explosion nucléaire globable d'à peine quelques secondes), le film de Podz rappelle que la vengeance a son prix, et répond à ceux qui disent « moi, je le ferais », en invoquant la sacro-sainte justice : « ah ouin? es-tu sûr que tu serais capable? ».