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La Corse au féminin.
Voilà un film qui dénote un peu dans la filmographie de Catherine Corsini. Par le fait qu’il n’y ait pas, pour la première fois dans sa riche filmographie, de tête d’affiche connue et qu’il semble en apparence moins ambitieux, plus comme une pause récréative. En tout cas, en apparence. En revanche, on ne parle évidemment pas de la polémique cannoise stérile et ridicule de la dernière édition où il a été sélectionné en compétition officielle. Une sélection étonnante d’ailleurs, car « Le Retour » - aussi réussi soit-il - ne fait pas à proprement parler des carcans habituels de la sélection de La Croisette. À la limite dans la section « Un Certain regard », et encore. Notamment comparé à son précédent film « La Fracture » (au demeurant probablement aussi son meilleur) qui était injustement reparti bredouille. Il contenait lui à la fois un fond social fort et en plein dans l’actualité (le système de santé français totalement archaïque et dépassé et la crise des Gilets jaunes), des actrices en état de grâce (le duo Foïs et Bruni-Tedeschi) et un propos contestataire et politique comme l’aime le festival. Ici, en dépit de quelques saillies contextuelles sur le déterminisme social et les rapports de classe, on est davantage face à une chronique estivale et adolescente; une sorte de double récit d’apprentissage en terre nouvelle qu’à une bête de festival. Et ce territoire nouveau, il s’agit de la Corse, terre natale de la réalisatrice. C’est justement sur ce point que finalement « Le Retour » revêt tout de même une place à part dans la filmographie de la réalisatrice.
Au départ, le sujet semble plutôt anodin. Il y est question d’une mère d’origine africaine dont le mari corse est décédé et qui revient sur l’Ile de beauté avec ses deux filles après l’avoir quitté quinze ans auparavant. La raison : un travail estival de garde d’enfants d’une riche famille mais en filigrane un retour aux racines, tandis que ses deux adolescentes vont apprendre autant sur leurs origines que sur elles-mêmes. Un fil narratif qui ressemble à celui d’un téléfilm suivi d’un débat mais que la caméra de Corsini magnifie, entre énergie solaire et moments pris sur le vif qui transpirent la véracité tout cela magnifié par le cadre corse. Mais, Corsini ne filme pas l’île comme une destination de carte postale, au contraire. Elle la filme telle qu’elle est, aussi belle qu’inhospitalière. A côté, le jeu des actrices non professionnelles qu’elle dirige (en plus des deux jeunes filles, on retrouve dans le rôle de la mère le César du meilleur espoir féminin pour « La Fracture », Aïssatou Diallo Sagna) est forcément dans le vrai puisqu’elles sont dirigées avec efficacité. Et le vrai, on le ressent dans chaque séquence jusque dans celle de fête techno dans une villa huppée. Pas facile de filmer la fête et ses excès de manière probante, Corsini y parvient comme peu de cinéastes l’ont fait. Et pourtant c’est une sexagénaire... Comme quoi! Dans « Le Retour » on rit, on est ému, on est touché et on réfléchit, surpris par une œuvre qui, l’air de rien, est loin d’être mineure et dont le souffle de la jeunesse irradie chaque image. On ne s’ennuie pas un seul instant. On passe un bon moment, pas inoubliable, pas son meilleur film, mais un long-métrage qui aura une place particulière dans l'œuvre de la cinéaste.
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