Denzel Washington a tellement d'expérience dans le domaine des films d'action comme celui-ci (on n'a qu'à penser à Unstoppable, The Taking of Pelham 123, Déjà Vu et The Book of Eli, tout ça lors des cinq dernières années) qu'on se demande à chaque fois ce qui a bien pu attirer son attention dans ce projet en particulier. Safe House ressemble beaucoup à tous ces films, que ce soit dans sa manière de filmer des scènes de combat aux multiples revirements (un mort pas vraiment mort, un coup de feu inopportun, etc.) que dans son désintérêt total à innover. C'est peut-être ce qui plaît à Denzel... et aux millions de spectateurs américains qui iront apprécier ces revirements simplets et rassurants.
Les scènes d'action en elles-mêmes ont cependant fière allure; elles sont filmées avec un certain instinct par le réalisateur Daniel Espinosa, technicien efficace qui utilise un montage frénétique pour ajouter en tension à ses scènes d'action. La direction-photo est d'ailleurs assez jolie, saturée en couleurs riches. À l'exception d'une - assez maladroite - au stade, la plupart des scènes d'action sont bien amenées et compétentes. Dans ces circonstances, les nombreux et accablants clichés sont une immense déception, en particulier cette histoire de taupe à la CIA, vue et remâchée cent - si ce n'est mille - fois.
Mais comme Washington et son compagnon Ryan Reynolds sont de toute évidence des acteurs capables de s'acquitter de leur tâche comme il se doit, le tout est rondement mené, souvent palpitant lorsqu'on n'est pas trop inquiété par les failles logiques. Soyons honnête, que le code moral du méchant l'empêche de tuer des « non-professionnels » (alors qu'il s'agit d'un agent de la CIA) tient de l'insulte à l'intelligence, au raccourci plus-que-forcé par les nécessités du scénario, de la même manière que les méchants sont de fabuleux tireurs quand il est question d'éliminer un personnage secondaire (ils ne ratent jamais) mais qu'ils sont très mauvais lorsqu'ils s'attaquent au(x) héros (qui prend toujours un « s », qu'on se le dise).
Ce qui est aussi dommage, c'est que les moments charnières du récit sont tirés par les cheveux et invraisemblables. Ce qui tient le film ensemble ne tient pas debout, et rien de ne devrait avoir lieu. Il faut un véritable effort du spectateur pour mettre de côté tous ces problèmes et croire, en quelque sorte, à l'univers qui lui est présenté. La question n'est pas de savoir si les combats sont réalistes - on a tout à fait compris le concept « d'action » dans un film « d'action » - mais si ce qui y mène a le moindre fond logique. S'il est possible que la situation présentée en soit arrivée là. Impossible de se laisser aller au plaisir d'une bonne bagarre si cet aspect n'est pas pris au sérieux.
Safe House est donc équivalent à des dizaines d'autres films du même acabit. Pas meilleur, pas moins bon, juste moyen, entre les deux, « correct ».