Issu de l'imaginaire de Jean-Jacques Sempé et de René Goscinny, Le Petit Nicolas a fait la joie de nombreux lecteurs d'hier à aujourd'hui. Ce ne fut toutefois pas toujours le cas des trois - et très oubliables - transpositions cinématographiques qui ont vu le jour ces dernières années. Qu'est-ce qu'on attend pour être heureux? risque de remettre les pendules à l'heure et de ravir les fans des bandes dessinées.
Il n'est plus question d'une adaptation avec de véritables acteurs. L'animation reprend ses droits, revenant à l'essence des dessins de Sempé. Des traits simples, vivants et limpides qui replongent le cinéphile dans le merveilleux monde de l'enfance. Celui où le bonheur est possible sans trop se casser la tête. Une vision qui fait un bien fou, en rupture avec une certaine animation contemporaine, qui a trop souvent sacrifié son âme au profit de simples prouesses techniques.
Tout cela est au service d'un récit intelligent et profondément humain, qui se déploie en deux axes. Le plus intéressant prend la forme du biopic, racontant l'amitié entre l'illustrateur Sempé et Goscinny (qui est également le papa d'Astérix et Obélix) qui s'occupait des textes. En filigrane se dessine un long métrage sur l'inspiration, la création et l'importance du travail. L'imagination est au pouvoir dans ces séquences et même l'émotion mélancolique qui happe de plein fouet à la fin. La présence de comédiens professionnels comme Alain Chabat et Laurent Lafitte comme doubleurs n'est sans doute pas étrangère à cette situation tant ils savent doser à la perfection gravité et légèreté.
Le duo se voit même discuter avec un Nicolas animé, qui prend littéralement forme sous nos yeux. Ces envolées plus enfantines, à l'humour quelque peu répétitif, semble reproduire les cases et bulles des bandes dessinées d'antan. Le concept ne tarde pas à s'épuiser, mais le résultat fidèle à son matériel source amuse amplement. L'idéal pour accrocher les enfants, alors que les plus vieux patienteront en attendant le retour de segments plus nutritifs et informatifs.
Réalisé avec minutie par Amandine Fredon et Benjamin Massoubre (qui a oeuvré ces dernières années sur le montage de somptueuses animations comme J'ai perdu mon corps et Le sommet des dieux), le film s'enchaîne avec fluidité, divertissant allègrement même si l'effet de nouveauté se dissipe assez rapidement. Le rythme posé bénéficie de mélodies enivrantes qui campent allègrement le Paris de l'époque.
Profond et ludique à la fois, Le Petit Nicolas: Qu'est-ce qu'on attend pour être heureux? arrive à renouveler la série en faisant confiance à l'intelligence de ses spectateurs, petits et grands. Après le somptueux Belle de Mamoru Hosoda et le cauchemardesque Mad God de Phil Tippett, il s'agit sans doute de la plus belle animation de l'année.