Surfant sur le succès phénoménal de Crazy Rich Asians, The Farewell élève la barre avec émotions et sensibilité.
Une famille chinoise éparpillée un peu partout sur la planète se réunit pour célébrer l'union d'un des leurs. Ce stratagème est un prétexte pour passer un peu de temps avec grand-maman, qui est atteinte d'un cancer incurable. Sauf que personne n'a encore osé lui révéler la vérité...
Le canevas de ce sympathique long métrage à saveur autobiographique n'est pas sans rappeler celui de l'excellent Good Bye Lenin. Un mensonge sert à enjoliver l'existence, à resserrer les liens du sang. De premières palpitations du mélo, l'ensemble rejoint la comédie gentille et tristounette, où l'on rit et pleure à la fois.
À partir de situations comiques attendues comme le choix du repas de noces et les traditionnelles photos de mariage, le film opère une réflexion mélancolique sur le deuil, la culpabilité, le déracinement et le temps qui passe, comparant les moeurs et les coutumes de pays comme la Chine, les États-Unis et même le Japon. Pas question, cependant, de froisser qui que ce soit, ces confrontations demeurant neutres et bénignes.
Ce sont les êtres humains qui se trouvent au centre des préoccupations du récit. Le ton sentimental évoque celui des premières créations d'Ang Lee, avec ses personnages poignants et attachants. C'est le cas de l'héroïne taciturne campée avec retenue et une certaine froideur par la chanteuse Awkwafina, qui représente bien ce clash entre les traditions et la modernité de la nouvelle génération. Son entourage s'avère tout aussi irrésistible. Particulièrement cette grand-mère que l'on aimerait tous avoir et qui n'hésite pas à remettre à sa place quiconque se retrouve sur son chemin avec ses légendaires «stupid girl'.
Cette noble matière première qui aurait pu porter la griffe du grand Yasujirô Ozu est développée par Lulu Wang (l'inédit Posthumous), qui sait comment rendre frais et crédibles les stéréotypes de son scénario. Elle a toutefois encore des croûtes à manger sur le plan de la mise en scène, aérée et vivante (les choix musicaux sont généralement exemplaires), mais au final trop sobre et rudimentaire. Quelques plans plus élaborés amènent heureusement un peu de pimpant au passage, comme ceux qui réunissent le groupe au sein d'un même cadre.
C'est lorsque le film ne semble pas se forcer qu'il atteint sa cible, que sa douce excentricité devient la plus palpable. Au contraire, son désir de complexité se retourne trop souvent contre lui. Cela survient avec ces incessantes métaphores d'oiseaux et sa finale sirupeuse, baignée d'une mélodie appuyée. Déjà qu'il s'agit du moment que les protagonistes choisissent afin de se promulguer des conseils de vies. Des morales conservatrices dont l'écho n'est pas le plus subtil (il n'y a rien de plus important que les valeurs familiales, alors il fallait absolument montrer la solitude de l'héroïne dans une grande ville comme New York...).
Ces excès sont heureusement rares. The Farewell traite de thèmes importants et universels en utilisant toute la palette des émotions, rappelant que c'est souvent par l'humour que l'on marque le plus rapidement les esprits. Voilà une oeuvre qui sera impossible de ne pas aimer le moindrement, comme en fait foi sa note parfaite sur Rotten Tomatoes.