Il faut d'abord savoir que le film pour ados est un genre bien spécifique au cinéma. Il possède ses codes et ses lois comme le thriller psychologique ou la comédie d'action par exemple. Les bons films d'ados se doivent d'être habités par ce sentiment d'invincibilité, bien spécifique à cette période charnière de l'existence humaine qu'est l'adolescence. En l'absence de cette émotion phare, le film tombe à plat. Before I Fall transpire de sensibilité jouvencelle, rebelle et optimiste. Le long métrage nous fait sourire à plusieurs reprises et nous transperce d'une tendre félicité.
Malgré sa maîtrise du genre, Before I Fall s'avère quand même cliché et moralisateur. On aurait espéré que le film use de davantage de subtilité et d'originalité. Le concept du Jour de la marmotte - un héros qui revit constamment le même jour de sa vie - a été exploité maintes et maintes fois à Hollywood et parodié encore plus souvent. Et, au-delà du principe, qui malgré son manque de personnalité s'avère relativement bien exploité, on aurait aimé un peu plus d'audace et des personnages moins typés; la méchante bitch, la lesbienne tomboy, la rejet folle, la naïve petite princesse, le gentil garçon romantique, le jeune premier populaire et narcissique, vous voyez le genre...
Bien que peut-être un peu quétaine (soyons honnêtes), la référence au mythe de Sisyphe - Dieu grec qui a été condamné par Zeus à pousser éternellement un rocher au sommet d'une montagne sans jamais y parvenir - est une image parlante et amusante au sein de l'histoire de Before I Fall.
Jouer ainsi avec la temporalité engendre inévitablement des questionnements qui nous détournent de l'histoire (Pourquoi ne panique-t-elle pas davantage? Pourquoi n'en parle-t-elle pas à personne? Pourquoi porte-elle toujours les mêmes vêtements? Pourquoi comprend-elle soudainement qu'elle a une mission à accomplir?). Par contre, ce n'est pas un problème qu'on associe uniquement à Before I Fall. Tous les films possédant ce genre de conjonctures entraînent ce type de réflexions. Les scénaristes auraient pu, peut-être, les minimiser davantage, mais les éliminer complètement relève de l'utopie, nous en sommes conscients.
La narration en voix off n'est pas d'une grande utilité ici. Cette dernière ne fait qu'appuyer l'aspect trop prêcheur de l'ensemble. Zoey Deutch livre une performance somme toute assez inspirée, malgré l'amplitude démesurée de certaines émotions. Les trois jeunes actrices qui interprètent ses trois meilleures amies sont également convaincantes. Seul Logan Miller manque de charisme pour jouer le potentiel amoureux de l'héroïne.
On ne sursaute pas à l'écoute de la version française comme avec d'autres productions traduites en France, mais le doublage de Before I Fall n'est pas sans failles pour autant. La première lacune se trouve au niveau de la petite soeur. Au cours du film, on nous laisse entendre que l'enfant aurait un problème de langage ou parlerait de façon étrange, ce qui n'est pas le cas dans la version québécoise. Le cinéphile ne comprend donc pas pourquoi l'héroïne tente de rassurer sa soeur par rapport à sa voix... un moment vraiment déconcertant. Il y a aussi cette décision de ne pas traduire le mot « bitch » par « salope ». L'impact de « tu es une bitch » n'est définitivement pas le même et, comme il s'agit d'une scène importante (qui revient à quelques reprises), le choix des mots a un impact considérable dans notre appréciation et notre compréhension de l'oeuvre. Parfois, c'est préférable d'assumer la traduction au complet plutôt que de laisser certains termes anglophones flotter dans les textes.
Before I Fall peut être décrit simplement comme un bon petit film d'ados. Pas une réussite sur tous les plans comme Easy A ni un échec comme I Am Number Four ou The Space Between Us, juste un petit film qui fait du bien. Est-ce que c'est suffisant? C'est à vous de voir.