Malgré la beauté des images de cette aventure presque incroyable en Antarctique, quelque chose cloche dans Le dernier continent. D'abord, Jean Lemire se prend pour un poète qu'il n'est pas avec ses confessions à la lueur d'une chandelle. Puis, l'histoire manque de punch. Difficile à croire quand on se dit que le film relate en moins de deux heures un voyage de 430 jours dans le froid d'un désert de glace encore vierge; pourtant, rien n'est laissé au hasard dans le film, c'est évident, et c'est justement ça le problème.
Une équipe de scientifiques, chercheurs et cinéastes s'embarque pour un voyage de plus d'un an en Antarctique. Coupés du monde, ils doivent survivre avec des réserves de nourritures difficiles à conserver, un espace restreint et les vents violents d'une petite baie du continent le plus mystérieux du monde. Mais la glace qui devait solidifier la position du navire se fait attendre tandis que la nature se déchaîne, ce qui met tout l'équipage en danger.
Très loin du documentaire, Le dernier continent est un film de fiction inspiré de faits réels. Cette réalité modifiée, nécessaire mais montée surtout, qui compresse en quelques minutes ce qui peut prendre des jours en prenant bien soin d'éliminer tous les désagréments (sommeil, besoins primaires) pour se concentrer sur ce qui fait le suspense. La finale expose d'ailleurs maladroitement toute les ficelles de cette manipulation lors du sauvetage inespéré (et passif!) d'un bébé phoque. De la manipulation sentimentale à l'état pur, enrobée d'une musique trop appuyée. Malheureusement, ce sont les membres d'équipage qui en souffrent le plus; ils sont peu présents et demeurent mystérieux jusqu'à la fin. Les quelques entrevues avec eux misent elles aussi sur l'émotion crédule; celle d'un homme, par exemple, qui aimerait être près de son père malade. On veut bien le croire et on comprend tout à fait son sentiment, mais pas exposé de manière si brutale, si intentionnellement lourde émotivement. Un peu de subtilité n'aurait pas nuit.
La narration, aussi assurée par Lemire, tombe elle aussi dans le piège du mélodrame et frôle la prédication. Le réchauffement de la planète ferait un excellent sujet de documentaire, mais, rappelons-nous, Le dernier continent n'en est pas un. On imagine très bien le défi qu'un tel périple offre aux aventuriers assez audacieux pour s'y lancer et tous les défis humains qu'ils ont à relever, mais on veut les voir. Presque pas de chicane entre les membres d'équipage, les seuls conflits sont inégaux; on est à la merci de la nature, on attend, impuissants.
Bien sûr, les images grandioses du film sont d'une beauté époustouflante, mais personne n'a pu prouver à ce jour que le cinéma n'était qu'une suite de panoramas et de beaux paysages, et Le dernier continent n'y parvient pas non plus. Ce n'est pas suffisant, c'est un album-photo tout au mieux. Et exactement comme avec n'importe quel album-photo, on peut regarder des photos du voyage (aussi intérieur soit-il) et féliciter ceux qui l'ont accompli, mais on ne peut pas le vivre.
Malgré la beauté des images de cette aventure presque incroyable en Antarctique, quelque chose cloche dans Le dernier continent. D'abord, Jean Lemire se prend pour un poète qu'il n'est pas avec ses confessions à la lueur d'une chandelle. Puis, l'histoire manque de punch. Difficile à croire quand on se dit que le film relate en moins de deux heures un voyage de 430 jours dans le froid d'un désert de glace encore vierge; pourtant, rien n'est laissé au hasard dans le film, c'est évident, et c'est justement ça le problème.