The Snowman devait être le grand suspense de l'année. Il s'agit d'un livre à succès par un cinéaste de génie, avec un casting cinq étoiles et un compositeur émérite. Au lieu de ça, on se retrouve devant une des plus grandes déceptions de 2017.
Comment un tel projet a-t-il pu déraper à ce point? C'est à n'y rien comprendre. Comme si tout le monde avait travaillé trop rapidement. À force de couper les coins ronds, on obtient un scénario brouillon, où il semble sans cesse manquer des scènes importantes afin de rendre l'intrigue intelligible.
On y retrouve un tueur en série qui laisse des bonshommes de neige sur les lieux de ses crimes, des femmes disparues qui finissent démembrées et un flic bourru, à la limite alcoolique. Des clichés qui semblent provenir de tous ces suspenses anonymes des années 90 - les Copycat, Kiss the Girls et autres Bone Collector - qui ne faisaient que remâcher les illustres Silence of the Lambs et Seven.
Les années ont passé, de nouvelles références comme Zodiac sont apparues et le problème est demeuré entier. La copie s'avère trop souvent de mise, surtout lorsqu'il est question de transposer des romans immensément populaires au grand écran. Un filon qui a fait ses preuves. Peu importe les fils blancs, les hasards commodes et les coups de théâtre prévisibles : si l'écrivain a du style, c'est (presque) tout ce qui importe.
Une réalité que l'on retrouve également au cinéma. Devant la fade et télévisuelle trilogie scandinave de Millenium, David Fincher avait élevé les enjeux avec sa version de The Girl with the Dragon Tattoo, créant des métaphores de solitude et d'enfermement avec la neige et le froid, utilisant toutes les possibilités de son art.
On ne retrouve rien de tout ça au sein de cet ersatz qui se dégonfle tout de suite après l'intrigante entrée en matière. Aucune tension ne se dégage des situations, alors qu'il faut chercher fort pour y déceler une quelconque ambiance, la moindre atmosphère. C'est l'ennui qui prend toute la place. Même la trame sonore originellement prévue de Jonny Greenwood du groupe Radiohead a été remplacée par celle de Marco Beltrami, qui est utilisée n'importe où n'importe comment.
Si tout cela venait d'un quelconque tâcheron, ce serait déjà mieux. Mais pas du réalisateur suédois Tomas Alfredson, qui avait révolutionné le film de vampires avec Let the Right One In et qui a offert en Tinker Tailor Soldier Spy un des opus les plus éblouissants de la décennie. Même épaulé de Martin Scorsese en tant que producteur, il est incapable de redresser la barre. Insuffler du sérieux à cette série B n'était pas la meilleure des idées, tout comme offrir une mise en scène auteuriste.
Cela finit par laisser les acteurs à eux-mêmes, emprisonnés dans des personnages superficiels à la psychologie inexistante. Michael Fassbender déambule comme un mort-vivant, conscient que sa carrière est en train de lui échapper. Et ce n'est pas en imitant encore une fois un bruit d'animal qu'il la récupéra. À ses côtés, Rebecca Ferguson (remarquée dans Mission: Impossible - Rogue Nation) fait son possible. C'est déjà mieux que J.K. Simmons qui est loin de maîtriser son accent et de Charlotte Gainsbourg qui apparaît dans un moment de séduction particulièrement risible. Aucune chimie ne se développe entre les comédiens et on aimerait bien voir les scènes retranchées avec Toby Jones et Val Kilmer, dont les présences se limitent à de la simple figuration.
Se déroulant dans une magnifique, mais violente Norvège enneigée où tout le monde parle anglais, The Snowman ne saura susciter l'intérêt des fans du livre original ou des amateurs de thrillers tant tout ce qui apparaît à l'écran sonne faux. On se consolera en jetant notre dévolu sur Wind River qui aborde des sujets similaires avec beaucoup plus de savoir-faire.