M. George W. Bush,
Merci de bien vouloir m'accorder ces quelques minutes de votre temps. Je sais à quel point vos journées sont occupées. Entre deux promenades à cheval et vos nombreuses implications caritatives en Irak, il ne doit pas vous rester beaucoup de temps pour lire les préoccupations d'un cinéaste peu connu et non influent. Mais je tente ma chance !
Je suis le réalisateur du film The Sentinel, qui sortira bientôt sur bon nombre d'écrans. On y raconte les mésaventures de l'agent de sécurité Pete Garrisson (Michael Douglas), chargé de la protection de la Première Dame américaine (Kim Basinger). À la suite du meurtre d'un confrère et ami, Garrisson se trouvera mêlé, bien malgré lui, à une histoire de complot visant l'assassinat du Président. C'est l'agent Breckinridge (Kiefer Sutherland), un de ses meilleurs amis, qui devra démêler cette intrigante histoire, le tout sur fond de trahison amoureuse.
Je viens de revoir mon film et j'ai maintenant quelques doutes quant à sa qualité. Je me demandais si vous ne pouviez pas le voir et me donner vos commentaires par la suite. Votre actuelle fonction de président vous qualifie d'emblée.
Je crois malheureusement avoir fait un film sur un sujet complètement éculé et j'ai bien peur de ne rien proposer de nouveau. Ça m'embête un peu, je l'admets. Clint Eastwood n'a-t-il pas fait le même film? Et combien d'autres avant ou après lui? Je trouverais assez dommage avoir réalisé un film déjà tourné des milliers de fois. Qui donc voudrait bien l'écouter? Je me fierai à votre bon jugement. Je sais que vous êtes un homme de valeur.
Je me questionne aussi sur la superficialité de certains moments. La fin entre autres. Sans trop vous en dire, j'ai l'impression que le dénouement était à prévoir depuis les premiers instants de l'oeuvre. Navrant. Et pourquoi fallait-il que mes vilains soient du Kirghizstan, un ancien membre du bloc communiste soviétique? Ça respire le cliché ne trouvez-vous pas ? J'avais pensé prendre l'Irak pour vous faire plaisir, mais j'avoue avoir eu peur de Saddam, il est incontrôlable, même en prison.
J'avais une foi inébranlable en Michael Douglas. Comme pour vous avec Rumsfeld. Il avait tellement joué ce rôle souvent que je ne pouvais me tromper. Mais c'est probablement ce qui causa sa perte. J'ai bien peur que le public ne se tanne du flic bourru, rongé par le mal, mais foncièrement bon. J'aurais dû opter pour Vin Diesel. Lui au moins nous aurait fait rire. Kiefer Sutherland ne m'enchante pas vraiment davantage. Vous savez l'excellente série 24 heures... Et bien, c'est le même rôle. Rien de bien nouveau donc. Je vous entends déjà me questionner à propos de Kim Basinger. Je vous arrête tout de suite. Meryl Streep est trop vieille, Sharon Stone trop occupée et Julia Roberts trop jeune. Qui me restait-il ?
Mais je me console en pensant au rythme de mon film. Lors de la projection à laquelle j'assistais, j'ai surpris un critique à ma droite (tiens, vous l'auriez sans doute aimé lui) sur le bout de son siège. Vrai que j'ai mis la main à la pâte pour insuffler au long-métrage une énergie qui ne s'estompe jamais. Mes scènes d'action ne sont jamais tirées par les cheveux, le tout semble plutôt véridique. Je suis assez fier de cet aspect. Et c'est haletant, essoufflant presque. Vous me direz quand même votre opinion à ce sujet. Vous vous y connaissez plutôt bien parait-il en matière d'action et d'armements...
Je sais, je suis plutôt pessimiste. J'ai un certain doute quant au succès de mon film. Plus j'y repense, moins je le trouve bon. Je ferais mieux d'arrêter d'y penser. Je vous envoie une copie. J'attendrai de vos nouvelle M. Bush. Je sais que vous répondrez vite, vous avez la gâchette rapide.
Merci !
Clark Johnson, réalisateur.
M. le Président, je viens de revoir mon film et j'ai maintenant quelques doutes quant à sa qualité. Je me demandais si vous ne pouviez pas le voir et me donner vos commentaires par la suite. Votre actuelle fonction de président vous qualifie d'emblée.
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