Arrivant sur les écrans de cinéma le jour même de la fête nationale américaine, The First Purge est loin d'être le brûlot escompté sur les États-Unis d'aujourd'hui.
Le succès de la série The Purge est indéniable. Les trois premiers longs métrages ont coûté moins de 40 millions de dollars et en ont rapporté plus de 300. Même s'il ne s'agit pas à proprement parler de bons films, il était aisé de se défouler avec ces satires sadiques qui venaient titiller nos plus bas instincts. Surtout que la prémisse, amorale à souhait sur cette nuit annuelle où tous les crimes sont permis, permettait de prendre le pouls d'une nation au bord de la crise civile, ancrée dans son hypocrisie et ses luttes de classes.
Que vient rajouter cet antépisode à part certainement des dizaines de millions de dollars au compteur? Absolument rien. C'est là qu'on parle d'une opportunité manquée, car il s'agit du premier tome offert pendant l'ère Trump. Pourtant, la réalité est bien plus affreuse que cette fiction, qui reproduit simplement les codes établis sans jamais oser les repousser ou les remettre en question. Devant la foisonnante matière première du réel, le scénario de James DeMonaco s'avère particulièrement chiche. S'il a le mérite de donner la parole à une population afro-américaine (bon point pour lui), pourquoi alors les ensevelir sous les clichés? Déjà que les clins d'oeil aux tragédies historiques - spectre du Ku Klux Klan, Ferguson - ne sont qu'instrumentalisés de la façon la plus élémentaire et simpliste possible.
Contrairement à ses prédécesseurs qui arrivaient à piquer la curiosité lors des trop longues minutes se déroulant avant le début de la purge, cette production-ci faillit lamentablement à la tâche. Aucun enjeu digne de ce nom ne se met en place, encore moins du suspense, et on se met à regretter Ethan Hawke ou Frank Grillo tant les nouveaux personnages sont aussi charismatiques que des manches à balai. Même lorsque l'alarme sonne pour annoncer le début des sanglantes festivités, ce n'est pas suffisant pour secouer le marasme du spectateur. Sans doute que la violence est bien brutale. Sauf qu'elle est pâle à côté de celle qu'on a déjà vécue dans les autres volets. Un ou deux flashs potables ne feront jamais oublier tous ces sursauts cheaps et gratuits que provoque un débalancement des effets sonores.
Alors qu'on était sur le point de classer The First Purge parmi les pires oeuvres de l'année, un renversement de situation vers la fin fait glisser la prétention inhérente vers une sorte de plaisir coupable assez irrésistible, une série B qui s'assume enfin totalement. C'est celui où le héros, Y'Lan Noel, le Wesley Snipes des temps modernes, se transforme en une sorte de Terminator, s'armant jusqu'aux dents pour aller détruire, seul, des dizaines de mercenaires spécialement entraînés. Une séquence d'action complètement cinglée qui fait rire aux larmes tant elle est tirée par les cheveux. C'est à ce moment que la mise en scène de Gerard McMurray (Burning Sands), très discrète jusque-là pour ne pas dire sans apprêt, sort de ses gonds, offrant enfin quelque chose de valable à se mettre devant la rétine.
Ces excès de folie et de rage ne sauvent peut-être pas la production du naufrage. Il s'agit, à n'en point douter, du tome le plus décevant du lot. Mais derrière une formule usée jusqu'à la moelle se cache encore un franc potentiel, des idées valables à développer, à l'aide d'un meilleur scénariste et d'un réalisateur plus talentueux. Spike Lee serait le choix tout indiqué en cas de suite. Et il y en aura probablement une très bientôt.