Il n'y a rien de plus surprenant que de voir un cinéaste réputé pour ses oeuvres violentes et malsaines se lancer dans des films pour enfants. Si Martin Scorsese (Hugo), Robert Rodriguez (Spy Kids, Shorts) et Bong Joon-ho (Okja) y sont parvenus, pourquoi pas Eli Roth, le maître du torture-porn avec ses Hostel? Ce changement de registre lui est bénéfique, alors qu'il signe sa meilleure création en plus d'une décennie.
Basé sur le livre à succès écrit par John Bellairs en 1973, The House with a Clock in its Walls suit les tourments d'un orphelin (Owen Vaccaro) qui apprend les rudiments de la magie auprès de son oncle (Jack Black) et de sa voisine (Cate Blanchett). C'est Harry Potter avant le temps, sans sa mythologie, mais avec un sens de l'amusement beaucoup plus développé.
Ce qui n'aurait pu qu'être une histoire de deuil et de courage façon A Monster Calls se transforme assez rapidement en un dérivé de Goosebumps ou du premier Jumanji, où un lieu incroyable prend littéralement vie. Le manoir de l'oncle semble évoluer devant les yeux du nouveau venu, séduisant amplement par son originalité et ses nombreux locataires, que ce soit un chien divan trop mignon ou ce griffon de feuilles coquin qui passe son temps à péter et à déféquer...
Le long métrage s'adresse à un auditoire de 10 ans et il ne faut surtout pas chercher une quelconque complexité. Il n'y a pas de place pour les thèmes profonds ou même une histoire qui sort de l'ordinaire dans ce cartoon exubérant, qui multiplie les hommages au cinéma de maisons hantées des années 30 à 50 avec ses décors gothiques d'un kitch consumé et ses effets spéciaux volontairement datés. L'humour forcément inégal prend le dessus, touchant régulièrement la cible même s'il n'est pas toujours politiquement correct.
Le récit aurait toutefois mérité un rythme plus soutenu, surtout dans la première partie qui tarde à lever. Mais une fois que tous les éléments sont placés sur la surface de jeu, le réalisateur peut enfin délirer, saupoudrant d'effets horrifiques et fantastiques les situations. Rien pour traumatiser les jeunes âmes, sauf peut-être les plus sensibles. La section la plus réussie demeure le dernier tronçon où tout explose dans une bizarrerie exquise et grotesque à la fois (on ne verra plus les citrouilles de la même manière), rappelant que Roth est parvenu à y insuffler son style unique.
Les plus petits n'en auront que pour Owen Vaccaro, découvert dans les Daddy's Home et qui se plaît à singer Jacob Tremblay de l'époque The Book of Henry. Plus pertinent encore est le couple qui s'adresse aux parents. Jack Black est parfaitement dans son élément, connaissant mieux que personne ce type typé à souhait. C'est toutefois Cate Blanchett qui surprend par sa facilité à donner sens à un personnage unidimensionnel, faisant oublier son faux pas d'Ocean's 8. Les deux stars se bidonnent tellement à se voler la vedette qu'elles deviennent du coup le duo le plus insolite de l'année. Les morales sucrées sur la famille et l'amitié ne font que renforcer le côté mignon et décalé de la production.
Lorsque la magie opère, The House with a Clock in its Walls devient cet agréable divertissement que l'on aurait voulu voir à l'âge du jeune héros, friand de ce mélange de franche rigolade et de moments d'effroi. Ce n'est pas toujours le cas de la première à la dernière image et la conclusion démentielle vient racheter l'introduction un peu pénible. Sauf que c'est suffisamment étrange pour qu'on s'y attarde.