La nuée Critiques des membres

Invasion rurale.

Une salve de films de genres a débarqué sur les écrans français à la réouverture des salles. Il y a eu le très référencé et sympathique « Méandre » suivi de « The Deep House » ainsi que de « La Nuée ». Et ce dernier est clairement une franche réussite bien que ce soit certainement le moins fantastique ou horrifique des trois. En effet, hormis quelques saillies gore et le mystérieux comportement des sauterelles, on ne peut pas vraiment dire que ce long-métrage original et tout à fait réussi soit à classer dans ce type de catégorie. Surtout qu’on ne peut pas dire qu’il fasse vraiment peur et encore moins sursauter. Tout au plus on peut dire qu’il s’avère angoissant et inquiétant. L’ambiance est anxiogène à souhait et tranche avec le calme rural de la campagne du Lot où se situe l’action de « La Nuée ».

C’est d’ailleurs une excellente idée qu’a eu le jeune cinéaste (et oui c’est un premier film et c’est impressionnant de maîtrise) que de planter son décor hors des villes et dans cette petite ferme du Sud de la France. Et cette nouvelle vague de films se déroulant dans la campagne est à la mode et réussit bien à installer différents genres dans le drame paysan, du thriller comme dans « Petit paysan » à la comédie comme dans « La famille Bélier » ou encore du naturalisme comme dans le récent « Louloute ». Ici le soupçon de fantastique est parfaitement intégré à ce contexte rural made in France et lui confère tout son charme et son originalité. Philippot y insère en plus un sous-texte écologique de manière fine et nécessaire. Il propose même des solutions sans être didactique. « La Nuée » déborde donc de qualités et d’idées mais le cinéaste ne tombe jamais dans le travers du trop ou du pas assez. En ce sens c’est admirable, humble et approprié.

Son film n’est jamais excessif ni bordélique, il trouve toujours la note juste. Il manque peut-être juste un peu de budget et d’ampleur et aurait mérité une fin moins abrupte. On aurait aussi aimé un peu plus de gore, à la Cronenberg, et peut-être une montée dans la peur un peu plus intense. Mais la tension monte comme il faut, doucement et surement. L’autre grande réussite de « La Nuée » vient clairement de ces personnages. Vraiment creusés, intéressants et passionnants, les membres de cette famille décomposée sont crédibles et attachants. Les relations mère-fille, frère-sœur ou entre amis sont justes et cela nous permet de vraiment se plonger dans leurs peurs et leurs drames et de s’identifier à eux. Suliane Brahim est une révélation impressionnante dans le rôle de cette mère prête à tout pour sauver son exploitation (elle fait penser à un pendant féminin de Swann Arlaud dans « Petit paysan »). Elle mériterait une nomination aux prochains Césars, ce qui permettrait au film de genre d’être reconnu à sa juste valeur. Une excellente surprise que ce suspense rural à la menace inédite, biblique et angoissante.

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