C'est fou ce que l'effet Wonder Woman peut apporter. Malgré une fin atroce, le solide film en solo a littéralement sauvé les aventures cinématographiques de DC Comics. Même si Justice League n'est pas du même calibre, il est nettement supérieur aux misérables Batman v Superman: Dawn of Justice et Suicide Squad qui l'ont précédé.
Peut-être est-ce le retrait du cinéaste Zack Snyder, qui a quitté le projet avant sa conclusion pour cause de tragédie familiale. Remplacé par Joss Whedon (le réalisateur des deux Avengers), le long métrage peut enfin compter sur des séquences d'action satisfaisantes, claires et cohérentes. Sans doute que les effets spéciaux inégaux et trop abondants gâchent la sauce, ce qui n'empêche pas les moments spectaculaires d'affluer, évoluant dans des environnements stimulants et différents. Difficile de ne pas avoir de frissons en entendant la mythique musique des Batman de Tim Burton, gracieuseté de son collaborateur fétiche Danny Elfman qui s'occupe de la musique. On ne peut en dire autant devant le massacre des classiques des Beatles et de Leonard Cohen qui font littéralement saigner les oreilles.
Le metteur en scène a même eu le temps de secouer le scénario léthargique de Chris Terrio. Dommage qu'il n'a pas été embauché dès le départ à écrire le récit. Comme ses prédécesseurs, Justice League n'est pas tant un véritable film qu'une bande-annonce luxueuse - cette fois de «seulement» deux heures - vendant le prochain épisode. Celui qui est annoncé dans l'incroyable seconde scène pendant le générique final et qui met l'eau à la bouche.
En attendant de découvrir cet instant où rien ne sera plus comme avant, le spectateur doit se farcir une multitude de petites histoires sans intérêt, où les trop nombreux personnages se partagent l'écran en passant en coup de vent. Tous les destins demeureront vains et superficiels, si ce n'est que la vie de famille n'est pas une sinécure. Il y a Batman qui doit former une équipe (de ce côté, mieux vaut revoir l'hilarant The LEGO Batman Movie), Superman qui manque à l'appel, Flash qui semble être la réincarnation de Quicksilver des X-Men, Cyborg qui a autant de charisme qu'un monolithe, Aquaman qui n'aura pas la cote en cette ère post-Weinstein et Wonder Woman qui vole encore la vedette à tout le monde. Ils devront affronter un méchant d'une fadeur abyssale qui cherche évidemment à anéantir la planète. Un vilain en capture de mouvement qui est loin de posséder la fougue d'un Andy Serkis (Gollum, Caesar de la récente trilogie Planet of the Apes).
Ce qui manque surtout à cette série, c'est une identité, de la personnalité. Justice League ressemble tellement à un dérivé de bas étage des Avengers que cela en devient gênant. Batman est une copie d'Iron Man, Wonder Woman de Captain America, Aquaman de Hulk, etc., jusqu'à Flash, interprété avec verve par Ezra Miller (l'inoubliable antihéros de We Need to Talk About Kevin), dont l'humour niais semble avoir été rajouté pour faire taire les détracteurs jugeant cette licence trop sérieuse. Sauf qu'il fait pratiquement les mêmes farces que le nouveau Spider-Man! Impossible de ne pas donner l'avantage à Marvel qui se permet à l'occasion de brasser sa vieille recette gagnante, ce qui offre, par exemple, Thor: Ragnarok, ce joyau de comédie.
La vision très machiste de l'ensemble tranche également avec celle du récent Wonder Woman. Dans ce succès critique et public, les vêtements des Amazones avaient une utilité, une fonction intrinsèque. Dans le cas qui nous intéresse, ils ne sont que des ornements inutiles qui ne servent qu'à montrer le maximum de jolies demoiselles légèrement vêtues. Une armure sexy vaut son pesant d'or, pas un semblant de robe qui ne protège en rien.
Au moins, il n'y a pas trop de stupidités irrécupérables façon «le prénom de Martha» derrière Justice League. Malgré son absence d'authenticité et d'originalité, le long métrage offre un minimum de compétence et de divertissement, ce qui risque d'être suffisant pour ses fervents admirateurs. Les autres attendront la énième suite qui risque d'être enlevante (air connu) et surtout le nouveau film sur Batman, sans Ben Affleck (yeah!) et avec Matt Reeves (double yeah!!) aux commandes. Tout risque d'être bien différent.