De plus en plus, on voit surgir sur nos écrans des films d'animation québécois. C'est une expertise qu'on développe peu à peu, avec beaucoup de sérieux et de rigueur. Mais, se mesurer aux géants américains (Pixar, Disney, DreamWorks, Nickelodeon), se différencier suffisamment pour rejoindre le public, habitué aux balises états-uniennes, n'est pas une mince tâche. La boîte montréalaise CarpeDiem a décidé de relever le défi. Elle n'en est d'ailleurs pas à ses premières armes. L'entreprise nous a donné précédemment le film Sarila et les deux Guerre des tuques. Cette fois, elle s'attaque à l'univers des monarques avec autant de souci du détails et de bienveillance qu'espéré.
La légende du papillon suit le périple des monarques Patrick et Geneviève et de la chenille Martin, qui participent à la migration avec leur nuée jusqu'au Mexique. Même si Patrick ne peut pas voler en raison d'une aile plus petite que l'autre, il trouve des moyens astucieux afin de prendre part au mouvement. Cette aventure contre vents et marées sera une grande quête d'autonomie et de réalisation de soi pour les trois amis.
Bien qu'on sente la recherche, l'investissement dans la construction de l'histoire, du langage (le mot « asclépiade » doit être prononcé 100 fois, « fleur » était visiblement trop convenue), le récit n'est pas aussi enlevant qu'il aurait pu l'être. Bien entendu, on s'adresse ici à de jeunes enfants, donc les prémisses doivent rester simples, tout comme la structure narrative, mais il manque ce petit je-ne-sais-quoi qui nous permettrait de nous attacher davantage aux personnages principaux et à leur quête. D'ailleurs, il y a quand même quelque chose d'agaçant dans le fait que les protagonistes d'un film d'animation se prénomment Geneviève, Martin et Patrick, mais qu'on nomme, dans la réalité, nos petits humains Fédora, Lupien et Myrtille...
Pour attirer les parents à un univers aussi enfantin, il faut des clins d'oeil humoristique qui leur sont adressés. Malheureusement, ici, l'aspect comique se limite à quelques farces sans grand raffinement, comme une chenille qui rote ou retient un pipi. Ceci étant dit, La légende du papillon trouve sa force dans sa morale bien construite (« assumer ses différences ») et la pertinence de son propos environnementaliste (les champs d'asclépiades qui se font détruire par des constructions de l'Homme). La qualité de l'animation n'est pas à négliger non plus. Sans révolutionner le traitement, on propose des images colorées et attrayantes qui ne sont pas si loin de ce que nous offrent les Américains. La trame sonore, contenant des chansons de Patrice Michaud, Coeur de pirate, Claudia Bouvette et plusieurs autres, fait aussi partie des forces du film. Les mélodies entraînantes apportent émotion et envergure à la proposition.
La légende du papillon n'est peut-être pas le meilleur film d'animation de l'année, mais il trouve sa place au sein d'une offre foisonnante.