Il ne faut pas se fier à l'affiche extrêmement mignonne de The Zookeeper's Wife, qui semble être la suite du sympathique We Bought a Zoo, mais sans Matt Damon. S'il y a effectivement des animaux trop trognons, il s'agit plutôt d'un film qui se déroule pendant la Seconde Guerre mondiale, alors qu'un couple polonais cache dans leur demeure de nombreuses personnes juives.
Basé sur le livre d'Angela Workman qui s'inspire d'une histoire vraie, le long métrage rappelle en beaucoup moins satisfaisant de grandes fresques sur l'Holocauste, dont Schindler's List de Steven Spielberg, ainsi que Samson et Korczak d'Andrzej Wajda. Le scénario mince et prévisible enchaîne de façon mécanique les moments intimes et ceux de foules. Dès qu'on pense avoir évité un piège dramaturgique, c'est pour mieux se retrouver dans un nouveau traquenard.
Impossible d'en être autrement avec une oeuvre aussi conventionnelle qui débute sur un magnifique plan de l'héroïne qui caresse une jolie bête en prenant soin de sa progéniture qui dort. Les animaux et les enfants sont toujours là pour émouvoir et c'est d'autant plus vrai ici. On les montre la plupart du temps en situation de crises avec de la musique mélodique afin de soutirer le maximum de larmes. Une technique éprouvée qui ne fonctionne plus tant la manipulation est évidente... et que le talent des jeunes comédiens laisse souvent à désirer.
Apportant une rare vision féminine à ce conflit, la cinéaste néo-zélandaise Niki Caro échoue malheureusement à créer un véritable souffle cinématographique. La tension n'est guère présente malgré le sentiment d'urgence de l'époque et ses belles images subtilement symboliques se perdent au sein d'une mise en scène sans audace. Est-ce que Whale Rider représente l'exception positive de sa filmographie qui ne fait que décevoir, que ce soit avec North Country, The Vintner's Luck et McFarland? Il semble bien que oui. En voilà une qui doit se ressaisir et vite, sinon l'adaptation en prises de vue réelles de Mulan risque d'en pâtir.
S'il y a quelqu'un qui peut sauver une création moyenne de sa seule présence, c'est bien Jessica Chastain. Elle l'a fait récemment avec Miss Sloane et malgré son immense talent, ce n'est guère suffisant. Cela ne l'empêche pas de livrer une forte prestation en jeune femme naïve qui se sacrifie pour les autres. Son personnage est cependant trop parfait, si hagiographique qu'il manque parfois de crédibilité. On s'amuse toutefois à la voir irradier au soleil comme dans The Tree of Life qui l'a révélée au grand jour, tout en regrettant certaines nuances psychologiques qui permettaient à Zero Dark Thirty et A Most Violent Year d'atteindre des sommets.
The Zookeeper's Wife appartient d'ailleurs totalement à son interprète rouquine, également productrice. C'est elle qui secoure les éléphanteaux en danger, qui sauve des vies et qui permet à Daniel Brühl de ne pas perdre la face en méchant nazi malgré sa fausse moustache risible. Le couple qu'elle forme avec le trop rare Johan Heldenbergh (bouleversant dans Alabama Monroe) est d'ailleurs la plus belle chose du film. Entrecoupé de flashs ingénieux, l'effort peine à toucher, à se démarquer et à s'inscrire dans l'inconscient comme pouvait le faire Le fils de Saul, ce chef-d'oeuvre immense sur la Shoah.