Le mystère des suites peut paraître insondable. Peu importe si un film est bon ou qu'il y a matière à incorporer des choses nouvelles et intéressantes sur le sujet. L'important est le box-office, qui a été considérable pour The Hitman's Bodyguard, succès surprise de 2017. Pourtant il ne s'agissait que d'un long métrage formaté au possible, qui possède au moins mille équivalents. Il en va de même pour le deuxième tome Hitman's Wife's Bodyguard, qui ressemble beaucoup à son prédécesseur.
En fait, il s'agit d'une variation encore plus grosse, bruyante et explosive. L'objectif n'est plus de pousser la comédie d'action à son paroxysme, mais d'embrasser goulûment la parodie, la satire, le pastiche. On se retrouve ainsi avec un super nanar méta qui recycle les idées sans jamais en proposer de nouvelles en retour. Son souhait est d'être le nouveau Deadpool et même en faisant appel à Ryan Rynolds, l'entreprise tombe rapidement à l'eau.
En payant hommage aux « classiques » musclés des années 80 et 90, l'effort possédait un terrain fertile afin d'en mettre plein la vue et les oreilles. Encore là, il faut autre chose que de citer directement Sean Connery (pour The Rock), Bruce Willis (Armageddon) et Kurt Russell (Overboard). Il faut assurer un tant soit peu, surprendre le moindrement plutôt que d'offrir toujours les mêmes poursuites, les mêmes affrontements. Pour une scène réussie comme celle de l'ascenseur qui évoque The Usual Suspects, il y en a dix ratées qui versent dans la surenchère, la complaisance, la redondance et l'ultra violence. Le tout nappé au sein d'un montage rapide et saccadé où il est bien difficile de s'amuser, alors qu'on change de ville toutes les dix minutes comme dans un épisode de James Bond ou de Mission: Impossible.
Patrick Hughes est de retour derrière la caméra et sa mise en scène demeure toujours aussi limitée et approximative. L'influence de son travail sur The Expendables 3 se fait à nouveau ressentir et il n'arrive jamais à s'approprier le matériel, à y mettre sa propre griffe. Cette réalisation aurait pu être faite par n'importe quel tâcheron, ce qui n'est pas le cas des meilleurs films d'action. Pensons seulement à Die Hard, Speed, True Lies, Face/Off ou, dernièrement, Max Max: Fury Road, Baby Driver, The Raid 2 et Tenet. Même le récent Nobody, qui n'avait rien de transcendant, assurait avec efficacité et savoir-faire. C'est le style de l'auteur qui fait souvent toute la différence quand vient le temps de proposer un combat endiablé ou une course effrénée.
Difficile également de prendre le tout comme une simple farce absurde, ironique et complètement disjonctée, parce que le véritable rire est absent de l'équation. Les scénaristes se forcent pourtant en multipliant les péripéties extravagantes et les sous-entendus, saupoudrant le tout d'une voix hors champ sardonique, d'allusions vulgaires, raciales et sexuelles. Rien n'y fait. L'ensemble apparaît vite terne et brouillon, laissant de glace avec ses élans kitsch quand vient le temps d'arrêter le temps pour insérer une mélodie clichée qui est censée faire sourire.
La multiplication des personnages n'est pas là pour aider. En plus de réunir le fabuleux tandem formé de Ryan Reynolds et Samuel L. Jackson (cela prend un gros 20 minutes avant qu'ils se retrouvent!), l'intrigue inutilement tarabiscotée implique une figure paternelle insuffisamment exploitée (Morgan Freeman), un agent qui ne sert strictement à rien (Frank Grillo), des apparitions factices du premier volet (Richard E. Grant et Gary Oldman), etc. La plus belle trouvaille s'avère sans aucun doute Antonio Banderas, parfait en méchant grec qui se prénomme Aristote. Dommage que sa motivation soit sabotée par un script particulièrement indigeste et incohérent. Il y a également la truculente Salma Hayek que l'on retrouve dans un rôle encore plus important. L'actrice cabotine à outrance, ne donnant pas sa place dans un monde d'hommes... bien que l'intrigue rétrograde et sexiste la mette toujours en rapport avec des éléments sentimentaux et familiaux.
Faisant passer la trilogie John Wick pour le Godfather du film d'action, Hitman's Wife's Bodyguard prend la forme d'un divertissement éculé et vite oublié, qui sent la formule à plein nez. Bonne nouvelle : la durée du long métrage a été amputée de 20 minutes par rapport à son prédécesseur. Sauf que se rendre jusqu'à la fin ne sera pas toujours évident tant la progression paraît pénible par moments. C'est l'été et on n'a absolument rien contre les productions légères et ludiques de qualité. Mais ce n'est pas nécessairement pour ce type de cinéma soporifique issu d'une autre époque qu'il fallait procéder à la réouverture des salles.