Le réalisateur Bachir Bensaddek s'intéresse une nouvelle fois à la diaspora algérienne après Montréal la blanche, qui était l'adaptation de sa propre pièce de théâtre. En apprenant que cette histoire est inspirée de faits réels, vécus par une dame qui s'est un jour présenté devant le producteur Serge Noël en lui disant que son parcours de vie pourrait être la prémisse d'un film intéressant, on ne peut qu'en avoir des frissons. Même si la fiction se mélange à la réalité dans ce drame familial, la violence du propos n'est pas légère.
Halima, une Française d'origine algérienne, est enceinte de son deuxième enfant. Quand elle apprend qu'elle aura, cette fois, un garçon, des souvenirs traumatiques refont surface. Elle doit alors avouer à son mari québécois, Sylvain, qu'elle lui a menti sur sa famille pendant toutes ces années. Elle n'est pas orpheline comme elle l'a toujours soutenu : son père, sa mère, ses soeurs et ses frères sont bien vivants. Halima annonce du même coup à Sylvain qu'elle a besoin de retourner France. Comme celui-ci refuse de la laisser partir seule, ils s'envolent ensemble vers l'Europe, avec leur jeune fille Léa. Sur place, Sylvain suivra sa femme dans ce pèlerinage pour se réparer, apprenant progressivement sur les blessures profondes d'Halima.
Le scénario a été construit de telle façon que le spectateur n'en sait pas davantage que Sylvain sur le bagage de l'héroïne, sur son passé et sur ses traumatismes. Au fil du récit et des rencontres avec les différents personnages, on découvre la virulence du drame et l'impact que celui-ci a eu sur Halima et l'ensemble de sa famille. De plus, la scénariste Maria Camila Arias est arrivée à créer un climat angoissant, oppressant, qui nous rive à notre siège. La vue du couloir lugubre de la maison d'enfance d'Hamila crée l'inquiétude chez le cinéphile sans même qu'il sache trop pourquoi. Si le film aborde certaines notions historiques, comme les Harkis (les gens qui ont combattu aux côtés de la France durant la guerre d'Algérie), il ne devient jamais lourd ou scolaire pour autant.
Antoine Bertrand personnifie avec douceur et humour le mari aimant, inconscient du passé horrible de sa femme. Nailia Harzoune, elle, dépeint adroitement les nuances de son personnage complexe, ne se laissant jamais verser dans une détresse trop perturbante. Ensemble, ils forment un couple crédible, voire enviable, malgré les perturbations de l'arrivée du nouvel enfant. Saluons aussi le travail de la petite Athéna Henry, de laquelle on s'attache dès les premiers mots.
Seul le dénouement confus et un peu expéditif pose une ombre au tableau. La femme cachée ne brosse pas une histoire facile, mais Bachir Bensaddek arrive à insuffler suffisamment de lumière dans son drame pour que nous ne soyons pas complètement abattus et déconfits après le visionnement. L'espoir gagne sur le désespoir.