Un des personnages de l'excellent Scream II affirmait que les suites étaient toujours plus sanglantes et les meurtres plus élaborés que dans la version originale, mais que rien ne valait cette dernière. The Conjuring 2 lui donne raison même s'il s'agit d'un film extrêmement divertissant.
Dans cette nouvelle histoire de possession, c'est maintenant au tour d'une famille défavorisée de Londres de recevoir la visite d'un démon. Cet être maléfique s'amuse à terrifier une mère monoparentale et ses quatre enfants et seul un célèbre couple de chasseurs de fantômes peut venir à leur rescousse. Mais cette menace existe-t-elle vraiment ou est-ce le simple fruit d'imaginations trop fertiles?
Cette prémisse qui ressemble beaucoup à la précédente et qui ne prêchait déjà pas par son originalité (elle serait inspirée d'une histoire vraie, parce que ça fait évidemment toujours plus peur) est cette fois gratifiée de thèmes beaucoup plus puissants. Le rôle de la foi est interrogé tout comme celui de l'amour, sans oublier ces nombreux liens sociaux et politiques qui se créent. Ce Mal n'est-il pas la manifestation d'une pauvreté chronique en Grande-Bretagne qui allait s'exacerber sous l'ère Thatcher?
Quoi qu'il en soit, le cinéaste James Wan connaît son métier et après un début de carrière chancelant avec Saw, Dead Silence et Death Sentence, il est en voie de devenir le Wes Craven ou le John Carpenter de sa génération. Sa maîtrise du genre horrifique impressionne et elle lui permet de faire claquer des dents presque constamment. S'il a toujours tendance à multiplier les sursauts gratuits, sa façon de soigner son ambiance malsaine et son atmosphère angoissante donne froid dans le dos. Surtout qu'il offre ici une mise en scène plus soignée et élégante que d'habitude, se permettant des plans-séquences tape-à-l'oeil comme le David Fincher de l'époque Panic Room tout en s'amusant follement à manipuler le spectateur. On est très loin de son travail consensuel sur Furious 7.
Il n'a cependant pas appris des erreurs du passé et cela risque de se retourner contre lui. Le premier Insidious qu'il a réalisé est une référence en la matière, alors que les deux épisodes successifs représentent du gros n'importe quoi. C'est pourtant là qu'il va souvent puiser pour The Conjuring 2, dénaturant du coup un peu le charme "oeuvre à l'ancienne" du premier volume. L'introduction annonce déjà les couleurs alors que notre héroïne médium s'aventure dans l'au-delà pour revivre un massacre passé, ce qu'elle n'aurait jamais fait avant. Un transfert qui devient monnaie courante et qui, rajouté à ces rêves omniprésents, révèle de véritables lacunes narratives où les incohérences ne sont pas rares.
Le désir de Wan d'en faire trop est également problématique. La subtilité du succès surprise de 2013 a été remplacée par une efficacité de tous les instants. Un surplus d'entités grotesques et de manifestations chroniques qui hantent alors que l'économie de moyens a souvent meilleur goût. On ne peut que louanger son désir de prendre son temps afin de bien faire monter la tension, mais échelonner le tout sur 135 minutes paraît un peu excessif et répétitif. Surtout qu'il y a au moins une bonne demi-heure de trop. Cela aide néanmoins les comédiens à trouver leurs repères et les personnages à prendre de la profondeur. Aux côtés des toujours excellents Vera Farmiga et Patrick Wilson se trouve l'exceptionnelle jeune Madison Wolfe qui s'est sûrement inspirée de la fillette dans The Exorcist.
Oppressant à souhait, teinté d'émotions à fleur de peau, de réels frissons et même d'humour, The Conjuring 2 est une rare suite qui tient la route. Sans atteindre la finesse de l'original, le récit qui donne un peu trop dans la surenchère est suffisamment intéressant et intelligent pour qu'on puisse un jour demander un troisième volet. Surtout après une telle finale...