S'il y a un film qui donne le goût de rester en appartement, c'est bien The Intruder.
C'est d'ailleurs ce qu'aurait dû faire un couple (Michael Ealy et Meagan Good) qui vient d'acheter la maison de ses rêve. Son ancien propriétaire (Dennis Quaid) y est toutefois encore très attaché et il fera tout pour la ravoir...
Avec ses excellents Get Out et Us, Jordan Peele semble avoir pavé la voie au cinéma à saveur sociale, politique et économique qui mélange suspense, humour et horreur. La maison en question est un peu la métaphore des États-Unis, alors que son ancien dirigeant - un homme blanc assez âgé - porté sur les armes à feu hésite à la confier à de jeunes gens qui n'en prendraient pas bien soin...
Peu subtile, mais efficace, cette satire de société se voit cependant court-circuitée par une seconde partie catastrophique. C'est là que tout bascule, l'histoire comme le long métrage. Le scénario concocté par David Loughery (à qui l'on doit notamment Obsessed et Lakeview Terrace : deux créations sur le harcèlement) implose sous le poids des clichés et des invraisemblances. Le récit devient tellement consternant que le spectateur ne pourra s'empêcher de rire devant le ridicule des situations. Mais est-ce voulu ainsi? Bonne question. D'un côté, le suspense inopérant multiplie les sursauts gratuits et les situations qui dépassent l'entendement. De l'autre, l'ensemble se prend terriblement au sérieux.
Quoi qu'il en soit, les réactions des personnages sont tellement stupides qu'il ne faudra pas se surprendre que le public leur crie dessus. C'est d'ailleurs ce qui est arrivé lors de la projection publique. Face à ces caricatures ambulantes, leurs interprètes ne peuvent rien faire d'autre qu'abdiquer. C'est d'autant plus dommage pour Dennis Quaid, qui a toujours pris soin d'éviter les navets. Sa performance impeccable dans l'immense Far From Heaven de Todd Haynes résonne toujours dans le coeur des cinéphiles. Peut-être avait-il besoin d'argent pour payer son hypothèque. Sauf qu'après une prestation aussi grotesque et risible, il est bon pour un Razzie.
Fallait-il s'attendre à autre chose avec Deon Taylor derrière la caméra? Tout ce qu'il touche se transforme en citrouille (de Supremacy à Meet the Blacks, en passant par Traffik) et son dernier travail évoque la série B d'antan, vulgaire visuellement, qui est parsemée de séquences pseudo-érotiques tape-à-l'oeil et de scènes de voyeurisme de bas étage. Il n'y a rien à sauver de sa réalisation totalement dépourvue de personnalité.
Normalement, ce type de production serait sortie directement en dvd (ou présentée en exclusivité sur TQS ou Netflix, selon son époque) tant elle n'a pratiquement rien à voir avec le septième art. Le résultat est tellement mauvais qu'il en devient presque drôle et fascinant. Surtout lorsqu'on suit la « psychologie » du héros qui refuse d'utiliser une arme à feu... à moins de protéger sa famille! Pour la morale et le cinéma, on repassera.