Film le plus coûteux de Netflix avec un budget oscillant autour de 200 millions de dollars, The Gray Man rivalise aisément avec les gros studios hollywoodiens, proposant de l'action à tout casser et un scénario d'une pauvreté affligeante.
Cette adaptation du livre de Mark Greaney s'apparente à un ersatz de Mission: Impossible revu et corrigé par Tom Clancy. Un prisonnier (Ryan Gosling) transformé en assassin par la CIA est abandonné par son organisation, devant fuir un ancien agent (Chris Evans) qui cherche à l'éliminer coûte que coûte afin de mettre la main sur une liste convoitée. C'est toujours la même histoire, prévisible et ennuyante, où il y a encore une fillette qui se fait kidnapper et de ridicules retours dans le passé censés donner de la profondeur et de l'émotion aux personnages.
Ce qui mérite l'attention, c'est la qualité des scènes d'action, trépidantes à souhait. Cela commence en trombe avec des affrontements musclés à Bangkok. Par l'utilisation des néons, la force du montage et la musique non orthodoxe, on pense au travail de Nicolas Winding Refn sur son magnifique Only God Forgives. Puis cela continue avec une incroyable évasion d'un avion à rendre jaloux tous les Uncharted de ce monde. C'est sans compter sur une séquence hallucinante en tramway qui donne littéralement des frissons. Sans lorgner dans les plates-bandes de John Woo ou de George Miller, Joe et Anthony Russo (à qui l'on doit les derniers épisodes des Avengers) propose une réalisation compétente et décontractée, à mi-chemin entre Michael Bay et les John Wick.
Dommage que le long métrage traîne autant en longueur et qu'il se veuille aussi répétitif. Le récit cogne littéralement un mur après une heure et l'intérêt en pâtit. L'intrigue devient de plus en plus rocambolesque et les poursuites se veulent mécaniques, interchangeables. Du produit efficace et pince-sans-rire, la production se mute graduellement en parodie, alors que le méchant détruit littéralement une demi-douzaine de villes et trucide froidement des centaines de personnes en tentant d'éliminer sa cible...
Pour son premier rôle depuis l'excellent First Man en 2018, Ryan Gosling la joue cool comme dans le grandiose Drive. On lui préfère pourtant Chris Evans, qui se débarrasse enfin de son costume trop poli de Captain America afin d'embrasser un sombre maniaque qui n'hésite pas à utiliser la violence et faire couler le sang comme à l'époque de l'éblouissant Snowpiercer. Leur affrontement final vaut d'ailleurs son pesant d'or. C'est toutefois surprenant qu'au lieu de valoriser le classique jeu du chat et de la souris, le script fait entrer dans la danse une multitude d'individus peu ou pas développés, que ce soit une alliée qui ne donne pas sa place en situation de combat (Ana de Armas), des patrons qui n'inspirent guère confiance (Regé-Jean Page, Jessica Henwick), l'immense star Dhanush, etc. S'il est bon de revoir au cinéma Billy Bob Thornton, on a complètement saboté la présence de l'impériale Alfre Woodard qui méritait bien mieux.
Aussi divertissant que bourrin, The Gray Man est facilement le meilleur film d'action depuis Top Gun: Maverick et il y aura sans doute des suites en cas de succès. Bien que l'effet de saturation soit rapidement atteint, il y a des moments vertigineux où l'adrénaline est dans le tapis. Les amateurs du genre y trouveront amplement satisfaction.